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29 septembre 2018

On frissonne

Le vent est tombé…

 

L’air semble immobile. Pas un souffle ne vient troubler les feuillages. Aucun tressautement dans les houppiers. Le vent qui agitait la forêt depuis plus de vingt-quatre a cessé. Le calme après la « tempête ». Certes, le terme est exagéré mais personne ne se plaint ce soir du silence enfin revenu.

 

Le ciel est bien dégagé. Clair, pur comme lavé par une forte pluie qui n’est pourtant pas tombée. Les lumières du couchant illuminent la forêt parée d’automne. Les bruns, les jaunes, les orangés se mêlent déjà aux teintes de vert.

 

Il fait frais. Une soirée idéale pour le brame…

 

Le sentier longe une propriété privée, en bas de pente. Sentier sableux et parcelles couvertes de fougères de près de deux mètres de haut. Et des Pins sylvestres pour achever de brosser le tableau. Des rondes de mésanges crient en haut des arbres. Très peu visibles, nous n’avons que nos oreilles pour les identifier. Beaucoup de Mésanges bleues. Et des Mésanges huppées. Ainsi qu’une nonnette et quelques longues queues pour l’exhaustivité de la liste.

 

D’autres petits cris aigus se font entendre. Des Roitelets huppés mêlés aux mésanges. Le roitelet est une toute petite boule de plumes figurant parmi les plus petits oiseaux d’Europe. Deux ou trois hectomètres plus loin, ce sont d’autres cris qui attirent notre attention. Puis un chant. La seconde espèce de roitelet : le Roitelet à triple bandeau qui comme son alter ego choisit de rester à couvert au milieu de la végétation.

 

Et comme la veille, une omniprésence de Grives musiciennes. Des « psitt » retentissent de tous les côtés. Tout au long de notre périple. Des oiseaux récemment arrivés du nord. Venus renforcer les contingents indigènes. Beaucoup poursuivront en direction du sud. Certains resteront dans la région pour y passer l’hiver. En attendant, les effectifs vont augmenter pour culminer à la moitié du mois d’octobre.

 

Une fois le soleil avalé par l’horizon, la température chute. Le ciel en feu est magnifique. Les rouges mêlés aux orangés. Puis s’estompant vers les roses et enfin les violets. La nuit débute. Elle va durer un peu plus de douze heures...

 

Et le froid tombe à son tour…

 

Notre pique-nique est un moment convivial. Qui debout, qui assis, l’attention se relâche un peu. Les enfants – affamés – dévorent à belles dents. Certains gardent tout de même une oreille orientée vers la forêt. Il est 20h00. La clarté faiblit. L’obscurité s’obscurcit. Et les estomacs entament ce pour quoi ils ont été conçus.

 

Moment de sérénité. Le calme règne. Plus rien ne bouge. La nature s’est assoupie.

 

Les stars se font attendre : 20h10, puis 20h20. Aucun brame ne vient troubler l’immobilité de l’air. Pas une vibration n’émane des sous-bois.

 

A 20h30, la lunette d’observation est mise en place dans un secteur dégagé. L’absence de lune et le ciel maintenant suffisamment noir : un interlude astronomique est lancé. Jupiter est proche de l’horizon et s’apprête à suivre le sort de notre étoile une heure plus tôt. Dans la lunette, le disque est bien visible ainsi que les quatre satellites galiléens – les plus gros des 79 objets gravitant autour de la planète géante.

 

Mars brille de mille feux. A l’est, elle sort au-dessus de la végétation au moment où Jupiter y sombre pour la nuit. L’éclat rouge – fixe – jette une once de couleur dans cet océan de noir. Effet garanti.

 

Mais lorsque la lunette pivote sur Saturne et ses anneaux, les commentaires cessent. Les mots ne franchissent plus la barrière de nos lèvres. A tour de rôle, chacun observe à l’oculaire de l’instrument. En silence. Les adultes pas moins impressionnés que les plus jeunes.

 

Quand un premier coup de gueule retentit derrière nous. Il est 20h45 et le brame vient de débuter. Les raires s’enchaînent dans le quart d’heure suivant. Espacés. D’assez faible intensité. Le groupe décide de bouger. Autant pour se rapprocher de l’animal que pour se réchauffer de l’engourdissement naissant.

 

Le cerf n’est plus qu’à trois cents mètres environ. Lorsqu’il brame en se tournant de notre côté, sa voix grave roule jusqu’à nous, puissante. Gonflant et emplissant l’air environnant. Vers 21h15, un second animal entre en scène. Dans la parcelle d’en face. Le groupe au beau milieu. Le brame en stéréo. Et comme il est fréquent, la concurrence stimule le premier cerf qui s’essoufflait déjà. Sur le ring, les deux compétiteurs s’affrontent. Un ping-pong s’installe : un coup de gueule à droite, un coup de gueule à gauche pour lui répondre. Une provocation à gauche, une réplique à droite pour ne pas se laisser marcher sur les pieds.

 

Mais il se fait tard et le froid devient piquant. Les enfants commencent à montrer des signes de fatigue. Le groupe rebrousse alors chemin dans la nuit noire et obscure – obscure et sombre. Le sentier est parcouru en sens inverse. L’oreille aux aguets. Une Chouette hulotte pousse un hululement. Un son clair porté au loin par le froid. La lune n'est pas encore levée. La forêt d'encre s'ouvre dans le faisceau de nos lampes. Forêt réduite au seuls cônes de lumière ne dépassant pas les cinquante pas devant nous. 

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Ambiance intime sur laquelle nous achevons la promenade. Certains au bord de l'endormissement. D'autre glacés jusqu'aux os. Mais toutes et tous heureux de la soirée !

  

Liste des espèces

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Oiseaux

Bernache du Canada, Canard colvert, Chouette hulotte, Pic vert, Pic épeiche, Geai des chênes, Mésange bleue, Mésange huppée, Mésange nonnette, Mésange à longue queue, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Grive musicienne, Roitelet huppé, Roitelet à triple bandeau

 

Mammifères :

Cerf élaphe

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