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18 décembre 2022
Coup de froid aux
étangs de Saint-Hubert.
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Rien que de la glace…

Décembre : son ciel blanc, son givre et sa petite bise qui rougit les lobes d’oreilles et les doigts. Nous sommes cinq au départ de cette nouvelle sortie nature : un bon chiffre compte tenu de la température qui nous glace de bon matin. Cinq à six degrés sous zéro selon les thermomètres et selon les domiciles de chacun. Jumelles autour du coup et thermos de thé brûlant dans le sac à dos, nous débutons la balade habillés de nos plus chaudes parkas en mode « Grands froids ».

De part et d’autres de la digue, rien d’autre que de la glace. Les étangs figés réverbèrent la pâle lueur d’un soleil voilé qui s’élève timidement au-dessus de la forêt. Les roseaux blanchis oscillent lentement, bercés par un souffle léger mais coupant. Des plaques de neiges subsistent encore au sol ici et là.

Des oiseaux ? Point ! Ou si peu. Un jeune Héron cendré se tient sur la glace, prostré, le plumage gonflé afin d’emprisonner sous ses plumes une couche d’air qui l’isole du froid. Un groupe d’une vingtaine de Corneilles noires sont elles aussi sur la glace qu’elles martèlent vivement de leur bec. Sans doute pour la percer et accéder à un peu d’eau liquide. Autour de nous trois ou quatre Rougegorges descendent à terre à la recherche d’une graine ou d’un quelconque autre aliment à se mettre dans le bec.

Mais le silence nous environne. Pas de cri d’oiseau. La gente ailée – en mode économie d’énergie – est trop occupée à chercher des calories. Tout au plus un croassement de Corneille noire ou un bruissement d’ailes de Pigeon ramier. La nature recroquevillée sur elle-même souffle sur ses doigts gourds pour tenter de les réchauffer un peu.

Nous nous mettons en route : marcher pour nous réchauffer, marcher pour rejoindre le pont Napoléon que nous voyons au loin. Nous longeons une lisière – bois de chênes à gauche, plaine agricole à droite. Les appareils photos crépitent pour saisir l’instant : le soleil qui ne parvient pas à réchauffer l’atmosphère, le givre omniprésent qui rend pastel chaque teinte de la nature. Des arbres squelettiques, sans feuilles se démarquent d’autres ayant inexplicablement gardé leur habit roux de l’automne. Un Geai des chênes signale sa présence ainsi que la nôtre de cris râpeux : attention, présence d’humains – danger ! Quelques mésanges arpentent les branches : Mésanges bleues et Mésanges charbonnières.

Depuis le pont Napoléon, l’ambiance reste la même. De la glace où que se porte le regard. Les étangs sont immobiles, le temps stoppé dans sa fuite en avant. Une lumière pâle, dorée tombe du ciel, diffractée à l’infini par une myriade de cristaux de glace. Nous nous installons pour jeter un coup de jumelles sur les environs lorsqu’un Rougegorge particulièrement familier s’approche et nous tourne autour. Moins de trois mètres nous séparent. L’espèce est photogénique avec sa poitrine orangée et sa mine aimable.

Nous trouvons finalement de l'eau libre…

Au bout de l’étang, des oiseaux se massent autour de deux minuscules trous d’eau. Des canards barbotent et s’ébrouent, autant pour se toiletter et se revigorer que pour battre l’eau et l’empêcher de geler. Mais la distance est grande : près d’un kilomètre. Nous levons rapidement le camp pour nous rendre à la digue suivante, la dernière – la plus à l’est. Nous accélérons le pas. Pour nous réchauffer et car l’heure tourne. La bise nous pique le visage. Les bonnets descendent au maximum sur nos oreilles, nos mains ont depuis longtemps disparues au fond de nos gants. Les orteils souffrent également malgré nos gros godillots et chaussettes de ski. La marche rapide nous est salutaire. Le sang redevient liquide dans nos veines, irrigue à nouveau nos extrémités blanchies. Les yeux pleurent mais la passion de la nature nous porte toujours plus avant.

Depuis la dernière digue, les oiseaux sont proches. Le premier trou d’eau est entretenu par une petite bande d’une trentaine de Canards souchets et par quelques Cygnes tuberculés. Des Mouettes rieuses s’approchent elles aussi et certaines d’entre elles parviennent à capturer un petit poisson venu imprudemment goûter le rayon de soleil. Un Grèbe huppé qui aime le risque plonge sous la glace pour pêcher sa pitance du jour. Pourvu qu’il retrouve toujours le trou et revienne à la surface : la couche de gel est trop épaisse pour qu’il puisse la briser et remonter à un autre endroit.

Le second trou d’eau est le long de la rive, au bord de la roselière jaunie par l’automne. De taille très modeste, il n’excède pas les quinze mètres de long sur à peine deux ou trois de large. Là, c’est l’affluence des grands jours. Plus d’une centaine de Canards colverts s’y tiennent au coude à coude, serrés tels des fans surexcités au pied de la scène sur laquelle se produisent leurs idoles – vous vous souvenez des images de Woodstock ? Autour, pas moins de 54 Grandes Aigrettes, 7 Aigrettes garzettes et une trentaine de Hérons cendrés imitent les statues du musée Grévin. Un Butor étoilé a également été aperçu quelques minutes avant notre arrivée. Réfugié dans les roseaux, ce magnifique oiseau ne nous fera pas l’immense plaisir de sortir à nouveau à découvert. Aigrettes et hérons partent ensuite au vol, vers l’est, vers l’ouest. Certains oiseaux s’éloignent alors que d’autres tournent et reviennent se poser à leur point de départ. Les mouvements se font alors plus fréquents et nous observons un beau ballet tout en harmonie.

Mais il nous faut repartir. Le quart d’heure durant lequel nous sommes restés immobiles a eu raison de notre chaleur interne. Comme les grands échassiers, nous éprouvons tout à coup le besoin de bouger, de remettre les machines en route et de produire à nouveau un peu de chaleur. Le retour est plus rapide. Le ciel se charge de plus en plus, le soleil devient plus lointain. Le froid reste vif mais nous prenons tout de même le temps d’admirer une petite bande de Pluviers dorés posés dans les blés d’hiver ainsi que le vol d’un très beau mâle de Busard Saint-Martin en chasse, deux mètres au-dessus du sol.

Le retour aux véhicules se fait aux environs de 12h30. Nous bouclons la boucle bien refroidis mais heureux d’avoir pris l’air. Les espèces observées ont été à la hauteur de nos espérances, l’ambiance hivernale empreinte de magie. De quoi nous préparer aux fêtes de fin d’année toutes proches.

Joyeux Noël ! Nous nous retrouverons en 2023…

Liste des espèces

Oiseaux :

Grèbe huppé, Grand Cormoran, Héron cendré, Grande Aigrette, Aigrette garzette, Cygne tuberculé, Canard colvert, Canard souchet, Buse variable, Busard Saint-Martin, Râle d'eau, Gallinule poule-d'eau, Foulque macroule, Vanneau huppé, Pluvier doré, Mouette rieuse, Pigeon ramier, Martin-pêcheur d'Europe, Pic vert, Corneille noire, Geai des chênes, Mésange charbonnière, Mésange bleue, Sittelle torchepot, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Merle noir, Grive mauvis, Grive musicienne, Pouillot véloce, Accenteur mouchet, Pipit spioncelle, Étourneau sansonnet, Pinson des arbres, Bruant jaune

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