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07 juillet 2022
Poigny-la-Forêt
au crépuscule.
..

Des nuages bien présents…

 

La météo est formelle : la soirée, à l’instar de toute cette journée, devrait se dérouler sous un soleil éblouissant. Pas un nuage à l’horizon n’est prévu. Les ingénieurs de MétéoFrance doivent bosser depuis un bunker antiaérien, dans une pièce aveugle sans possibilité de jeter un œil curieux dehors pour vérifier que prévisions et temps qu’il fait sont en adéquation…

 

Car ce soir, à l’instar de toute cette journée, les nuages plombent le ciel de façon certaine. Du gris où que le regard se porte. Du gris sombre ou du gris plus clair, mais aucune nuance pouvant être associée de près ou de loin à une vague notion de bleu. Les températures sont douces et la soirée devrait tout de même être agréable dans ce sous-bois estival.

 

Le groupe s’élance sur le chemin et pénètre en forêt, heureux de prendre l’air et d’observer la nature.

 

Les oiseaux se taisent pour la plupart. Beaucoup nourrissent leurs oisillons et se montrent donc discrets afin de ne pas attirer l’attention d’un prédateur sur la présence de jeunes oiseaux maladroits, pas toujours volants, sans expérience et donc particulièrement vulnérables. Le chant du Troglodyte mignon retentit pourtant sur notre gauche. Les notes aigues du Grimpereau des jardins tombent des hautes branches d’un chêne. Ou encore une strophe mélodieuse d’une Fauvette à tête noire qui attire l’oreille un instant. Pour le reste, la forêt reste silencieuse.

 

Patience…

 

Sur le bord du chemin, de hautes Fougères aigles nous encadrent. Au-dessus, Charmes, Tilleuls, Chênes et quelques Hêtres étalent leurs branches parfois épaisses. Nous jetons un œil à leur écorce, détaillons leurs feuilles, apprenons à les distinguer.

 

Un peu plus loin, une belle grenouille est découverte dans l’herbe au milieu du chemin. Avec quelques difficultés, nous parvenons à l’attraper pour l’admirer et l’identifier. Il s’agit d’une Grenouille agile à la peau brune et doté d’un élégant masque sombre sur l’œil, au museau pointu et aux longues pattes.

 

Après un dîner pris au milieu d’un carrefour forestier, nous débouchons dans une clairière couverte de bruyère. Le chemin la longe. Notre groupe pénètre sur le territoire des Engoulevents d’Europe. Il est 22h00 et le ciel est encore clair. Il est sans doute encore tôt pour contacter cette espèce crépusculaire. Dans l’attente, nous évoquons ces merveilleux oiseaux au vol papillonnant et au chant si particulier. Mais tout à coup, un individu arrive au vol, passe non loin de nous, pose dans un arbre le long du chemin et débute un concert. Un long bourdonnement s’élève alors dans la pénombre qui gagne du terrain à chaque minute.

 

Où tout s’accélère…

 

Puis un « psitt » sonore retentit derrière nous. Puis un autre et encore un autre. Une Bécasse des bois effectue son vol de parade (qu’on nomme « croule ») : un tour du propriétaire pour s’assurer qu’aucun autre oiseau de son espèce ne s’introduise sur son domaine. La chance est avec nous car la croule se termine. Elle a débuté en mars et s’achève souvent avec le mois de juin. Nous vivons donc les dernières heures et sommes heureux d’avoir encore pu y assister ce soir.

 

Les engoulevents effectuent un ballet au-dessus de la clairière et du chemin sur lequel nous sommes toujours, alternant vol de parade, chasse et chants. Nous nous éloignons au bout de quelques minutes afin de ne pas déranger les oiseaux et pour découvrir un nouveau couple un peu plus loin. Le manège se reproduit : vols acrobatiques durant lesquels les oiseaux s’approchent près de nous, chants… Nous ne savons pas toujours où donner de la tête d’autant que plusieurs Bécasses des bois passent et repassent sans cesse comme au plus fort de la croule. Une telle activité est surprenante si tard en saison mais nous sommes les derniers à nous en plaindre.

 

En tout, ce sont quatre à cinq couples d’Engoulevents d’Europe que nous découvrons dans cette partie de la forêt. Un chiffre conforme à celui comptabilisé les années précédentes – nous sommes toutefois dans la fourchette haute. De grosses chauves-souris chassent elles aussi les insectes. Leurs silhouettes sombres se découpent à chaque passage sur le ciel maintenant obscurci. L’observation devient difficile : oiseaux et mammifères volants ne sont bientôt plus que des formes indistinctes et viennent à se confondre.

 

Mais avant d’arriver aux véhicules et d’achever cette magnifique sortie, une dernière surprise nous attend. Le ciel se découvre soudainement. Les nuages sont emportés au loin découvrant la voûte céleste qui se pique peu à peu de points lumineux. Le premier quartier de lune est là lui aussi et répand sur la forêt une douce lumière pâle, presque fantomatique. L’ambiance est féerique. Alors que la fraîcheur de la nuit tombe lentement, nous admirons Véga (de la Lyre), Déneb (du Cygne), Altaïr (de l’Aigle) ou encore Arcturus (du Bouvier) – une étoile géante dont le rayon est vingt-cinq fois celui de notre soleil et située à trente-six années-lumière de notre système solaire. Ce qui signifie que la lumière que nous observons aujourd’hui a été émise par l’étoile en 1986 et ne nous parvient – compte tenu de la distance – qu’aujourd’hui.

 

Des distances vertigineuses et totalement inconcevables à notre échelle.

 

C’est sur cette infinie nocturne que la sortie se termine. Une sortie pleine de surprises faites d’observations très intéressantes et des odeurs de la forêt qui exhalent en soirée. Merci à toutes et à tous : nous reviendrons assurément !

 

Liste des espèces

Oiseaux :

Bécasse des bois, Chouette hulotte, Engoulevent d'Europe, Pic épeiche, Corneille noire, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Grive musicienne, Fauvette à tête noire, Pouillot véloce, Gobemouche gris, Pinson des arbres

 

Reptiles et amphibiens :

Grenouille agile

 

Odonates :

Aeschne bleue

 

Orthoptères :

Grande Sauterelle verte

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