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01 octobre 2021
Humidité et surprises...

Il pleut…

De fortes pluies balayent la forêt depuis le début de l’après-midi. Des grains battent le pavé, abreuvent la végétation et rincent le pèlerin qui n’a pas eu la prudence de rester à l’abri. Lorsque le groupe arrive au point de rendez-vous, c’est pour découvrir un environnement ruisselant et un sous-bois détrempé. Même le sol sableux du chemin ne parvient plus à absorber l’excès d’eau qui surnage à la manière d’un flot blanc d’écume sur une plage.

Le bruit martèle nos tympans. Des millions de gouttes coulent des feuilles supérieures pour frapper celles immédiatement en dessous et poursuivent leur trajet jusqu’au sol. Une légère brise hante les houppiers qui dansent mollement. La couleur du ciel nous laisse peu d’espoir quant à une amélioration soudaine.

Mais la forêt est paisible. Les promeneurs n’ont pas dû se bousculer aujourd’hui et les animaux n’ont sans doute pas été dérangés de la journée. Le tableau n’est jamais tout noir !

Très rapidement, bien avant d’avoir marché notre premier kilomètre, une biche est aperçue derrière un écran de végétation à quelques dizaines de mètres du chemin. Les conversations s’espacent. On chuchote bas. Et on scrute avec attention, à droite et à gauche. Fouillant les massifs de fougère, les espaces de bruyère.

Des Pouillots véloces piaillent dans les frondaisons. Un Rougegorge familier chante de sa voix douce et flûtée. Le rire d’un Pic vert retentit sur notre gauche et s’éloigne. A l’instar de ces derniers jours depuis près de deux semaines, beaucoup de Geais de chênes sont en maraude. Des oiseaux seuls ou par petits groupes de deux ou trois oiseaux. Leurs cris rauques retentissent régulièrement, semblant nous suivre.

Vers 19h15, nous parvenons en lisière d’une belle clairière. Une propriété privée dissimulée derrière un ventail qui a dû être opaque dans une vie antérieure mais qui laisse aujourd’hui tout le loisir d’admirer les animaux venus paître dans l’herbe humide. Une dizaine de biches sont là avec leurs faons. Au bout de quelques minutes, l’une d’elle tourne la tête vers nous, paraît nous apercevoir – ou nous sentir malgré un vent de côté –, et s’éloigne sans hâte suivie des autres. Les animaux restent à découvert et se laisse admirer dans le soir qui tombe vite. Avec nos jumelles nous cherchons le cerf. Car en période de brame, là où les femelles sont monsieur n’est jamais loin.

Et nous le découvrons à son tour. En lisière, le long d’une ligne de grands chênes. Un animal superbe avec de grands bois. Même s’il est malaisé de compter le nombre de pointes dans la pénombre, nous en dénombrons au moins quatorze – sept de chaque côté. Le cerf porte la tête bien haute : un détail qui trahit sa jeunesse. Un animal adulte et déjà suffisamment fort pour conquérir une place de brame, mais pas encore un vieux de la veille. Un animal de sept ou huit ans tout au plus, ce qui le placerait dans la première moitié de la trentaine dans le monde des humains.

L'image sans le son…

Monsieur est excité. Il sollicite chaque biche mais se fait chaque fois repousser. Les dames – parfois excédées – s’éloignent au petit trot souvent poursuivies par le mâle insistant. Un ou deux coup de gueule brefs qui ressemblent plus à des protestations qu’à un doux discours amoureux. Les dames ne semblent pas disponibles et restent de marbre. Monsieur – frustré – s’en retourne à son dîner, baissant la tête pour pâturer et contenter au moins son estomac. Bref coup de gueule derrière et un autre également sans suite au font à droite. Ce jeudi soir n’est pas une soirée de brame. Nous avons toutefois réalisé de très belles observations durant une trentaine de minutes avant que la nuit ne se referme.

Après un petit encas, nous reprenons notre chemin. La nuit est sombre. Il n’est que 20h30 mais l’épaisse couche nuageuse avale toute la lumière. Nous progressons avec précaution, butant parfois

du pied contre une pierre ou une racine. La pluie qui avait cessé durant plus d’une heure a repris. Faible, sous la forme de ces belles bruines qui ont façonné la Normandie et son magnifique bocage verdoyant.

Arrivés sur le plateau, nous nous trouvons tout à coup devant une cahute forestière – en pierre – largement ouverte sur l’extérieur où nous nous mettons à l’abri quelques minutes. Le toit de grosses tuiles nous protège et nous apporte un répit. C’est alors que nous apercevons quelques chauve-souris. L’une d’elle est accrochée près du faitage au crépis grossier du mur. Les autres sont accrochées aux tuiles sur le rebord d’un chevron. Leurs grandes oreilles nous évoquent des Oreillards ou des Murins. Les cerfs du secteur sont aussi silencieux que ceux du vallon. La météo n’a évidemment rien d’engageante et empire encore. Si la pluie n’augmente pas, le vent se lève et transperce nos couches textiles. L’humidité pénètre peu à peu et il nous faut reprendre la marche pour nous réchauffer.

Mais bientôt, loin sur notre gauche, nous parvient un brame plus important que celui que nous avons entendu jusque-là. Rien de fracassant mais deux ou trois belles voix se mêlent et nous parviennent apportées par Eole de façon intermittente.

Plus loin, la surprise de la soirée est observée au milieu de notre chemin. Un reptile long d’environ soixante centimètres se tient immobile. Nous pensons d’abord à un orvet – un lézard sans patte – mais nous identifions bientôt un serpent. Corps assez fin, couleur brune zébrée de sombre sans collier : une belle Coronelle lisse.

La fin de la sortie est de nouveau plus sèche. Le vent souffle maintenant fort mais la pluie a de nouveau cessé. Nous nous séparons peu avant 22h30. La soirée, mal partie, a finalement largement tenu ses promesses. Et même si le brame a été particulièrement pauvre, nos longues observations des cerfs, chauve-souris et serpents ont largement compensé cette déception.

 

Liste des espèces

Oiseaux :

Pigeon ramier, Chouette hulotte, Pic vert, Pic épeiche, Corneille noire, Geai des chênes, Mésange nonnette, Mésange à longue queue, Mésange bleue, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Rougegorge familier, Merle noir, Pouillot véloce, Pinson des arbres

Mammifères :

Cerf élaphe, Oreillard roux

Reptiles et amphibiens : 

Crapaud commun, Coronelle lisse

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