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13 août 2021
Soirée aux étangs 
de Saint-Hubert
...

Ciel bleu au-dessus de nos têtes…

Une fois n’est pas coutume, le ciel de ce soir est bleu. Le soleil encore haut inonde le paysage d’une lumière dorée quoiqu’encore un peu crue. L’horloge vient de sonner dix-neuf coups lorsque notre petit groupe se met en ordre de marche.

 

Une longue digue s’avance entre deux étangs. Une haute haie d’aubépine encadre la petite route sur laquelle aucune voiture ne circule jamais. La chaleur a fait sortir les insectes de leur refuge : Myrtils, Amaryllis, Tircis et Citrons chez les papillons, des cohortes de Sympétrums sanguins chez les libellules. Nous sommes au cœur d’une petite lucarne estivale perdue dans un océan automnal sans fin.

 

Profitons du soleil et de la chaleur – Météo France a déjà annoncé que cela ne durerait que l’instant d’un battement de cils.

 

Jadis destinés à alimenter les fontaines de Versailles en eaux, les étangs de Saint-Hubert constituent aujourd’hui l’une des principales zones humides de l’ouest de l’Ile-de-France. La biodiversité est plus importante ici que n’importe où ailleurs dans le sud du département des Yvelines. Près de 270 espèces d’oiseaux y ont été en effet observées au moins une fois.

 

Côté ouest la lumière est aveuglante. Le soleil descend lentement sur l’horizon. Le disque incandescent se reflète dans l’eau qui miroite de mille feux. Un Héron cendré aux ailes immenses arrive en planant et pose derrière un écran de roseaux. Quelques Foulques macroules accompagnées de leurs bambins en culotte courte barbotent devant nous. Les adultes plongent sous la surface, rapportent quelques herbes aquatiques prélevées sur le fond et en nourrissent les jeunes qui accourent bruyamment.

 

Côté oriental la lumière est splendide. Chaque teinte, des roseaux aux arbres de forêt, est saturée par la lumière rasante. La végétation flottante est abondante. Beaucoup de toutes petites libellules volent à surface de l’eau et posent sur les feuilles de nénuphars : des Naïades au corps vert. Une ou deux familles de Gallinules poule-d’eau mènent grand train autour de notre poste d’observation. Les jeunes de l’année – reconnaissables à leur plumage brun – se disputent. On râle, on crie, on court sur l’eau, on se pourchasse au milieu d’éclaboussures. Les parents – au bec rouge et jaune et arborant un plumage bleuté – contemplent la scène d’un œil incrédule : mais qu’avons-nous fait pour mériter des enfants si turbulents ?

 

Une question qu’elles ne sont pas les seules à se poser…

 

Un couple de Cygnes tuberculés sort bientôt de la roselière et traverse la pièce d’eau d’un air placide. Deux ou trois Ragondins se nourrissent dans la végétation : herbivores, ils grignotent des poussent de nénuphars et de potamots à quelques mètres de la rive.

 

Il est temps de poursuivre notre périple. Nous quittons temporairement le bord de l’eau. A notre gauche, les vestiges d’un champ de blé moissonné. Devant nous, des pâtures dans lesquelles broutent les chevaux du centre équestre tout proche. Herbe verte et belles clôtures de bois en lisière de forêt. Un cadre idyllique dans lequel se glisse tout à coup une forme allongée. Parmi les herbes en bordure du bois, une tête vient d’apparaître. Nous la fixons immédiatement dans la longue-vue sur pieds et prête à ce genre d’événement. Avec un grossissement de vingt fois, l’animal est magnifique : un très beau Renard roux dans la lumière du soir. Oreilles pointures, museau allongé, gorge blanche, pelage roux et queue en panache, Goupil ne jette pas un œil dans notre direction. S’il nous a aperçu, notre présence l’indiffère. Après avoir fureté trois ou quatre minutes, il rentre à nouveau dans la végétation et disparaît tout à fait. Quelle observation ! Et quelle aubaine ! Au-dessus de nos têtes, des chapelets d’hirondelles sont posées sur les fils. On jugerait des notes de musiques jetées sur une portée. Une merveilleuse symphonie dans laquelle domine largement les Hirondelles de fenêtre (à gorge blanche). Parmi elles, quelques Hirondelles rustiques (à gorge acajou) nous permettent de bien différencier les deux espèces.

 

En sous-bois, les arbres bordant le chemin nous surplombent. Les branches épaisses des chênes font penser à la voûte d’une cathédrale âgée de plusieurs siècles. Celle de Notre-Dame partie en fumée en avril 2019 nous revient évidemment à l’esprit. Les premiers arbres pour la rebâtir ont d’ailleurs déjà été coupés dans une forêt de la Sarthe. Nul doute qu’ils doivent ressembler à ceux-ci.

 

Peu avant 21h00, nous émergeons du couvert végétal et arrivons sur une digue de pierre qui a vu défiler ses cortèges de carrosses. A deux pas, se trouve en effet l’emplacement du château de Saint-Hubert bâti au milieu du XVIIIe siècle sur ordre de Louis XV. Le monarque aimait venir chasser en forêt d’Yveline (au singulier). D’abord simple pavillon de chasse, il fut régulièrement agrandi pour compter en 1772 jusqu’à cent-cinquante appartements. Véritable résidence royale, Louis XVI trouva pourtant le château trop exigu et préférait loger au château de Rambouillet qu’il venait d’acheter. L’Empereur Napoléon Ier aimait aussi les environs et s’est fait construire un pavillon de chasse bien plus modeste sur l’autre rive de l’étang. Si le château de Saint-Hubert a complètement été détruit en 1855, le pavillon de l’Empereur est encore debout même si sa splendeur est irrémédiablement derrière lui.

 

Un cadre royal…

 

C’est donc sur la digue, entre Louis XV et Napoléon que nous posons nos sacs. L’heure du pique-nique a largement sonné. Au nord-ouest, le soleil s’approche de l’horizon. Ciel et eaux s’embrasent dans les lumières de fin de journée. L’ambiance est magnifique et haute en couleur. Plusieurs petits groupes sont venus comme nous profiter de ce spectacle très prisé. La température est de plus idéale et propice à la flânerie.

 

Quelques Cygnes tuberculés flottent sur un miroir d’eau orangé. Petites silhouettes noires, ils plongent la tête sous la surface pour attraper des algues dont ils se nourrissent. Une petite bande de Chevaliers guignettes volent au ras de l’eau. Durant leur migration vers le sud, ils se sont arrêtés sur les étangs pour prendre quelques heures ou quelques jours de repos. Mais les hauts niveaux d’eau les contraignent à poser sur le rebord de pierre très pentu de la digue. En équilibre instable et dérangés par les promeneurs, ils volent fréquemment, poussant à pleins poumons des cris aigus typiques qui permettent bien souvent aux naturalistes de les identifier avant de les voir.

 

Le soleil parti éclairer l’Amérique, les couleurs s’estompent rapidement et la nuit s’obscurcit. Le retour se fait par la plaine. Le ciel parfaitement dégagé nous donne l’occasion de lever les yeux sur les premières étoiles qui s’allument progressivement. La lune est observée avec la lunette. Avec un grossissement de vingt fois et la lumière rasante du premier quartier, les ombres portées des montagnes et des rebords des cratères sont bien visibles. Ce n’est plus seulement un disque plat mais un monde observé en trois dimensions. Au sud-ouest, la lumière très vive de Vénus s’apprête elle aussi à disparaître sous l’horizon. Au sud-est, deux autres planètes brillent : Saturne et ses célèbres anneaux bien visibles et Jupiter et ses quatre satellites galiléens. Ce soir, en poussant le grossissement à soixante fois, les bandes sombres sur le disque jupitérien sont aperçues.

 

Alors que les ululements d’une Chouette hulotte retentissent au-dessus de la forêt, nous nous tournons vers le nord afin de clore la soirée. En utilisant un alignement d’étoiles de la Grande Ourse, nous découvrons l’étoile polaire. Plus à l’est, le célèbre « W » de Cassiopée et dessous, la fameuse constellation de Persée – vedette du moment ! Car les 12 et 13 août, nous fêtons le maximum de l’essaim des perséides. La nuit des étoiles filantes. Le ciel n’est pas encore vraiment noir et nous n’observons qu’une seule météorite se consumant en une belle trainée verdâtre. Mais nous ne pouvons rester davantage et le groupe se sépare peu après 23h00 avec plein d’images devant les yeux.

 

Une belle sortie avec enfin une météo estivale !

 

Liste des espèces

Oiseaux :

Héron cendré, Canard colvert, Buse variable, Chevalier guignette, Mouette rieuse, Foulque macroule, Gallinule poule-d’eau, Râle d’eau, Chouette hulotte, Pigeon ramier, Tourterelle turque, Tourterelle des bois, Pic vert, Pic épeiche, Hirondelle rustique, Hirondelle de fenêtre, Corneille noire, Mésange bleue, Mésange huppée, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Pouillot véloce, Troglodyte mignon, Moineau domestique, Pinson des arbres

 

Papillons de jour :

Citron, Vulcain, Tircis, Myrtil, Amaryllis

 

Papillons de nuit :

Ecaille chinée

 

Libellules :

Naïade au corps vert, Orthétrum réticulé, Sympétrum sanguin

 

Mammifères :

Renard roux, Ragondin

 

Amphibiens :

Grenouille agile, Grenouille verte, Rainette verte

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