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20 août 2021
Soirée en sous-bois...
Le calme d’une fin de journée…
Une belle lumière filtre à travers les branches. Le sous-bois est dessiné par une lumière douce de fin de journée. Une lumière légèrement dorée qui sature la végétation de couleurs chaudes. Les bruyères en fleurs sont particulièrement belles. La Callune commune côtoie la Bruyère cendrée et nous profitons de l’occasion pour différencier les deux espèces.
Un voile nuageux blanchit quelque peu le ciel qui aurait pu être bleu. Il ne fait pas réellement chaud mais l’air est humide, lourd. Les vestes que nous avions enfilées tombent rapidement : marcher donne chaud même si notre rythme contemplatif n’a rien d’une performance sportive.
La forêt reste silencieuse. Un « Uit » de Pouillot véloce à gauche, une crécelle sonore du Troglodyte mignon à droite, quelques babilles d’Hirondelles rustiques chassant les insectes au-dessus des houppiers, le croassement d’une Corneille noire...
Au sol, peu de traces. Là, le passage de quelques sangliers gravé dans le sable du chemin. Ou les petits pieds d’un chevreuil ici. Mais pas d’indice de biche ni de cerf durant le premier kilomètre de notre périple.
Parvenus au bord d’une belle clairière de graminées illuminée par le couchant, notre groupe scrute aux jumelles la lisière. Aucun animal n’est pour le moment visible. Il est bien sûr encore tôt et il est possible que nous soyons observés en retour par des mammifères surpris de nous trouver là. Sans doute attendront-ils que nous nous éloignons pour sortir à découvert. Pour ne pas renoncer trop vite, nous choisissons de reculer un peu à couvert et de pique-niquer là. Un œil sur nos victuailles, un autre à surveiller l’espace ouvert.
Mais aucune silhouette, aucun mouvement.
Après notre repas, nous poursuivons notre sortie alors que le soleil baisse sur l’horizon. Des lueurs orangées illuminent l’occident mais restent en grande partie masquées par la forêt. Des Grandes Sauterelles vertes stridulent. Un Orvet est découvert sur le sol. Malgré son apparence, ce n’est pas un serpent mais un lézard sans patte. Il est évidemment inoffensif et ne mord pas.
La soirée change le ton…
L’obscurité gagne. Le soleil est descendu sous l’horizon et l’ombre s’est propagée partout. Sur notre gauche, un mouvement alerte immédiatement notre groupe qui interrompt sa progression. Mouvements de fuite dans les hautes herbes du sous-bois. Des bons d’un animal alerte, léger : un chevreuil qui reste invisible. Deux ou trois minutes plus tard un brusque aboiement retentit. Le brocard nous signifie son mécontentement d’avoir été dérangé. Monsieur rouspète et nous envoie une volée de bois vert par-dessus son épaule… On imagine ensuite qu’il s’éloigne lentement, se remettant de la peur que nous lui avons infligée bien malgré nous.
La forêt s’anime alors. Il est près de 22h00 et les Chouettes hulottes entrent en scène. Magnifiques ululements du mâle. Réponse stridente de la femelle. Ululements d’un autre mâle sur notre gauche. Un très beau concert débute alors et nous suit tout le reste de notre sortie.
Vers 22h30, la pleine lune se hisse au-dessus des arbres. Sa lumière blanche jette sur la forêt une atmosphère pâle, mystérieuse. Fantomatique et empreinte de magie tout à la fois. Nos appareils photos s’animent et immortalisent la féérie de l’instant. Photos de la lune elle-même. Et photos des branches de pins et de chênes en ombre-chinoise. Nous étions tous à comparer nos réglages lorsqu’une voix puissante, grave s’est élevée dans la nuit. Nos préoccupations techniques s’envolent alors en une seconde. Avons-nous rêvé ? Une hallucination collective ?
Non !
Non ! La voix reprend. S’élève de nouveau en direction de la lune et se propage à toute la forêt environnante. Un cerf brame ! Notre premier d’une saison qui commence à la fin du mois d’août. Ce n’est pas rare mais le premier – celui qui lance la saison – a toujours une saveur particulière. L’effet de surprise passé, nous écoutons le soliste avec délice. Quand un autre cerf répond bientôt au premier. Un à gauche, l’autre à droit : le brame en stéréo.
Chuintement d’une Effraie. Une autre espèce de chouette que son plumage très pâle distingue de la sombre Chouette hulotte. La « dame blanche » comme on la surnomme parfois devient rare. Avec son habitude de chasser les rongeurs au ras du sol, elle paie chaque année un très lourd tribu, fauchée par les voitures lorsqu’elle traverse une route un mètre au-dessus du bitume. La disparition des vieilles granges dans lesquelles elle niche et du bocage où elle aime chasser n’arrange rien.
Nous reprenons notre progression. Il est 23h00, la nuit s’est complètement refermée sur nous et les odeurs de pins et de bruyères montent jusqu’à nos narines. Les deux cerfs continuent de se défier à quelques centaines de mètres l’un de l’autre. Leurs voix nous accompagnent le reste de notre balade. Nous levons la tête pour jeter un œil sur la voûte céleste. La lueur de la lune estompe les étoiles les plus faibles. Mais la Grande Ourse, Cassiopée et l’étoile polaire sont bien visibles. Nous ne perdrons plus le nord à l’avenir. Du moins par nuit claire.
Alors que le voile nuageux s’effiloche, les voix maintenant lointaines des cerfs continuent d’emplir la nuit. Les étoiles défilent et la température fraichit nettement. Devant les premiers frissonnements, le groupe se sépare. Une belle sortie qui marque officiellement le début de la saison de brame qui va s’étirer tout le mois de septembre et le début d’octobre. Nous aurons l’occasion d’en reparler…
Liste des espèces
Oiseaux :
Buse variable, Pigeon ramier, Effraie des clochers, Chouette hulotte, Pic vert, Pic épeiche, Hirondelle rustique, Corneille noire, Mésange bleue, Mésange huppée, Mésange charbonnière, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Pouillot véloce, Troglodyte mignon
Libellules :
Aeschne mixte
Papillons de jour :
Myrtil
Mammifères :
Cerf élaphe, Chevreuil européen
Reptiles & Amphibiens :
Orvet fragile