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2 juillet 2020

Un soir en forêt...

Le plafond s’élève…

Ciel chargé en ce début de soirée. Mais après une matinée pluvieuse le plafond s’est peu à peu élevé tout au long de la journée. Le vent qui a agité les branches ces derniers jours est lui aussi tombé. L’amélioration se poursuit – nous laissant espérer une météo douce et sèche pour cette sortie en forêt.

 

Alors qu’un carré de ciel bleu s’invite au-dessus de nos têtes, le groupe s’élance sur le chemin menant au sous-bois. Le Rougegorge familier chante sa plainte au rythme lent. Le Rougequeue noir alarme – série de cris secs, rapides – et prévient ses jeunes de rester dissimulés dans la végétation jusqu’à ce que les humains – nous – s’éloignent.

 

Le sous-bois nous happe. Forêt jeune à droite. Forêt jeune à gauche. Des arbres de faible diamètre, nombreux, en rangs serrés. Quelques vieux arbres tiennent encore debout. Des chênes à l’écorce profondément veinée. Puis après la barrière en bois, nous parvenons à la forêt domaniale : la quatrième de France en terme de superficie. Changement de décors : notre chemin s’engage au cœur d’une magnifique futaie âgée. Des chênes adultes deux fois centenaires, au tronc couvert de mousse. Un sous-bois clair peuplé de jeunes charmes, de quelques Alisiers torminaux et d’une poignée de hêtres.

 

Le Pic mar troue tout à coup le silence. Un cri saccadé, rapide, aux notes humides. La Sittelle torchepot s’excite elle aussi. Voici plusieurs semaines que l’espèce se faisait discrète le temps d’élever ses jeunes. Les bambins doivent avoir grandi. Voleter ici et là non loin du domicile familial. Prendre déjà une indépendance certaine. La famille se balade. Communique. Le Pouillot véloce bavarde lui aussi. Son célèbre « Psip-Psap » qui lui a valu son surnom de « compteur d’écus » : un Harpagon empilant ses deniers dans le secret d’une alcôve sombre. Le Troglodyte mignon – l’un des plus petits oiseaux d’Europe – jette ses notes au vent d’une voix de stentor.

 

La couche nuageuse se déchire à cet instant. Un flot de lumière tombe du ciel. Irradie le sous-bois, le couvre d’un aplat doré, scintillant. Chaque tronc, chaque feuille sont dessinés par un contre-jour très photogénique.

 

Un léger souffle venu du nord-est nous caresse le visage. Le chemin que nous empruntons maintenant est à bon vent. Nous avançons en silence afin – peut-être – d’apercevoir un animal. L’œil attentif musarde, fouille la végétation du regard. L’oreille elle aussi aux aguets, attend le moindre mouvement, le moindre bruit dans le sous-bois. Quelques papillons jouent les prolongations et volent encore pour quelques minutes : deux Miroirs se laissent admirer dans les graminées. Deux papillons de petite taille, aux sous-alaires teintées de jaune paille et fortement ponctuées de blanc. Une espèce rare en Ile-de-France dont la forêt de Rambouillet est le bastion régional.

 

La forêt est calme. Pas de mammifère visible malgré nos attentes. Des Pipits des arbres – des passereaux élégants, typiques des lisières et des parcelles ouvertes et lumineuses de forêt – piaillent au sommet d’un chêne dégarni. Sans doute un petit groupe familial. Les oiseaux s’envolent à notre approche, sauf un qui reste en évidence au bout d’une branche sèche. Admiration à travers nos jumelles malgré le contre-jour.

 

La lumière baisse peu à peu...

 

Le pique-nique s’organise autour d’énormes rondins de bois. Autant de bancs et tables hautes mis à disposition par l’équipe de bûcheronnage qui n’a pas encore retirer tout le bois de la dernière campagne de coupe. De lourds nuages approchent de nouveau. Sans pluie mais kidnappant une part de la luminosité. Les oiseaux diurnes se sont réfugiés dans la végétation. Plus un son hormis le Rougegorge familier, la Grive musicienne et le Merle noir qui ont l’habitude de chanter tard le soir. Le petit monde du crépuscule et de la nuit patiente encore en coulisse. Déjà un pied sur la première marche de l'estrade mais attendant que la lumière baisse encore un peu. En ce début juillet, les journées sont longues et la nuit se fait attendre…

 

Il est 22h00 lorsqu’un « Psitt » puissant se fait entendre au-dessus de la forêt. Une Bécasse des bois passe au vol un peu plus loin. L’oiseau reste invisible, masqué par les houppiers touffus qui dissimule son entrée en scène. Mais la bécasse repasse une seconde fois, un peu loin sur le chemin. Le même oiseau ou un oiseau différent : difficile de le savoir. Un chevreuil traverse lui aussi notre champ de vision. Saute le chemin, d’un fourré à l’autre et disparaît avant que nous ayons seulement conscience de son apparition. Comme un éclair lors d’une nuit d’orage.

 

A 22h30, un long bourdonnement monte dans l’air doux. Un Engoulevent d’Europe s’invite à la fête. Il est loin, à l’autre bout de la parcelle : son chant nous parvient atténué. Alors qu’une lune presque pleine sort des nuages et des frondaisons, nous reprenons notre périple pour nous rapprocher du soliste. Dix minutes plus tard, dans une nuit éclairée par une lumière pâle, notre groupe parvient aux pieds du soliste. Juste au-dessus de nous, l’engoulevent chante à pleins poumons. Un long bourdonnement ne semblant jamais devoir s’achever. Pouvant durer plusieurs minutes sans que l’oiseau ne manque de souffle.

 

L’oiseau quitte son perchoir, s’élance dans l’air, nous survole – curieux – fait un tour d’une aile légère et s’éloigne au-dessus de la forêt hors de nos regards émerveillés. Le bourdonnement reprend, plus loin. Plus bref cette fois. Avant de s’interrompre.

 

Il est dans les 23h00. Deux à trois kilomètres nous séparent des véhicules et nous reprenons notre marche avant que le marchand de sable ne passe. Dans une nuit pas tout à fait noire, nous avançons sans voir nos pas. Sur notre droite, un couple de Chouettes hulotte discute. Monsieur chante, ulule, pousse des « ouuhh » sonores. Madame lui répond d’un cri strident.

 

Dans un ciel qui se dégage rapidement, les étoiles brillent. Seules les plus puissantes trouent le clair-obscur. Car la lune au sud, le halo de l’agglomération parisienne au nord-est et les dernières lueurs du couchant au nord-ouest ternissent la voûte céleste et masquent les astres plus faibles. Le triangle des belles d’été est toutefois bien visible. Trois étoiles appartenant aux constellations de l’Aigle, de la Lyre et du Cygne sont accrochées au plafond.

 

Et c’est sur les cris aigus d’une jeune Chouette hulotte que le groupe se sépare. Il minuit moins un quart d’heure et la balade s’achève dans la douceur d’une nuit plus chaude que les précédentes. Les oiseaux et les mammifères ont été calmes ce soir. Mais nous sommes parvenus à rencontrer un beau panel d’espèces pour terminer sur un engoulevent en voix, un des objectifs de la sortie. Merci à tous d’être venus.

 

Liste des espèces

Oiseaux :

Bécasse des bois, Pigeon ramier, Tourterelle des bois, Chouette hulotte, Engoulevent d'Europe, Pic épeiche, Pic mar, Corneille noire, Geai des chênes, Mésange bleue, Mésange huppée, Mésange nonnette, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Rougequeue noir, Merle noir, Grive musicienne, Fauvette à tête noire, Pouillot véloce, Pipit des arbres, Serin cini, Pinson des arbres

 

Mammifères :

Chevreuil européen

 

Papillons de jour :

Miroir, Myrtil

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