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25 juin 2020
La forêt au départ
de Rambouillet !
Voilé mais lourd…
Juillet avance à grands pas. Déjà le vingt-cinquième jour. Le ciel en ce samedi matin ne sait pas ce qu'il veut. Ni ce qu'il nous réserve pour cette journée. Très nuageux mais laissant filtrer une lumière chaude. Humidité sortie dont ne sait où en cette période très sèche qui alourdit de beaucoup la sensation de moiteur. Un pull accroché autour de la taille pour parer à toutes les éventualités, nous risquons de le trimballer pour rien tout au long de la sortie. Nous le savons mais ne pouvons nous résoudre à partir bras nus sans prévoir une petite laine au cas où le temps tournerait au vinaigre...
Le sous-bois, pourtant assez sombre en raison de l'épaisseur des frondaisons qui s'étirent au-dessus de nos têtes, est taché de lumière. Lumière douce. Des rais tombent obliques sur le sol et enveloppent une mousse, un tronc, une fougère. Une atmosphère un peu magique qu'il est difficile de saisir sur une photo. Le plaisir des yeux n'en ai pas moins réel.
Des papillons virevoltent d'une fleur à l'autre. Ou passent simplement au vol devant nous, croisent notre chemin et s'éloignent de leur côté. Beaucoup d'Amaryllis, petit papillon orange et brun, très commun en été en forêt et le long des lisières. Myrtils, Tircis et Tabacs d'Espagne complètent le tableau. Un Pic noir posé à terre ne nous entend pas arriver. Au bord du chemin sur lequel nous marchons – nous sommes souvent baissés pour photographier les papillons dans la végétation – l'oiseau ne remarque pas notre lente avancée. Lui même occupé à chercher sa nourriture (composée d'insectes), il se rend brutalement compte de notre présence toute proche et s'envole à tire d'ailes. Sans crier gare dans un premier temps, mais en râlant tout ce qu'il peut une fois à quelques distances et hors de portée de notre dangerosité supposée. C'est la plus grande espèce de pic en Europe. Environ 45 centimètres de haut, de la tête à la pointe de la queue pour une envergure de soixante-dix centimètres.
Le silence règne. Juillet est le mois où les oiseaux achèvent de nicher. Les tardifs nourrissent encore des jeunes au nid tandis que les autres se baladent ici et là en famille. Des rondes de mésanges s'organisent déjà. Regroupant plusieurs familles. Parfois plusieurs espèces. Mésanges bleues, Mésanges charbonnières, Mésanges nonnettes... Les oiseaux piaillent dans les feuilles. Se pendent parfois la tête en bas sur un fruit déjà mûr pour le décortiquer et se nourrir des graines qu'il contient. Mais ces fruits sont encore bien rares. On cherche alors des insectes, des chenilles. Des jeunes se font encore quelques-fois nourrir par l'un des parents. Apprentissage au milieu de petits cris flûtés.
Sur l'étang de Coupe-Gorge à sec, des dizaines de papillons blancs butinent dans la végétation haute qui a colonisé les rives et le fond de la dépression vide. Piérides du chou – avec sa tache apicale noire en forme de croissant de lune. Piéride de la rave – avec le dessous de ses ailes blanc uniforme. Piérides du navet – avec ses nervures sulfurisées de noir. Les trois espèces se côtoient et nous permettent d'apprécier les différences qui permettent de les ranger dans telle ou telle case. Un Souci – papillon jaune-orangé – apparaît à son tour et tranche avec le blanc des piérides.
La chaleur monte. Même si le ciel reste très voilé, le soleil n'est pas loin. L'atmosphère lourde du matin s'alourdit encore en milieu de journée. Si les oiseaux sont discrets, les insectes eux sont omniprésents. Nous découvrons plusieurs miroirs – un beau petit papillon ponctué de blanc – et nous baptisons aussitôt notre chemin la « Galerie des glaces ». Les premières libellules apparaissent elles aussi peu de temps avant notre pause déjeuner. Une femelle d'Orthétrum réticulée à la livrée jaune et noire. Et une Aeshne affine reconnaissable à ses yeux bleus.
Après-midi plus grise...
A 13h00, le pique-nique est voté à l'unanimité. Autour de nous, les feuillus se font plus rares qu'au cours de la matinée. Des peuplements de résineux monospécifiques (Pins sylvestres) couvrent de grandes surfaces. Des arbres plantés et cultivés comme on cultive le blé, le maïs, des carottes ou des choux. On ne parle pas d'agriculture mais de sylviculture. Le pin pousse plus vite que le chêne. Et permet une ébénisterie bien moins onéreuse.
L'après-midi est plus grise. Et venteuse. Car Eole souffle maintenant à l'heure de la digestion. Des nuages plus épais s’amoncellent au-dessus de nos têtes. Un chêne monumental apparaît alors au détour d'un chemin. Agé de trois ou quatre siècles. Plus de cinq mètres de circonférence. Et des branches plus épaisses que la majorité des arbres des parcelles environnantes. Un Chêne sessile aux feuilles pédonculées – comme il se doit...
Une borne de grès profondément ancrée en terre borde le chemin. Un blason sur une face, un second sur l'autre. Une borne armoriée posée en 1547 pour résoudre un sac de nœuds inextricable ayant pour origine le mariage de Marie de la Roche-Guyon, fille et héritière de Guy VII, seigneur de la Roche-Guyon, et de Michel, seigneur d'Estouteville et de Valmont en 1448... Le décès de Guy VII, puis celui de Michel d'Estouteville et le remariage de Marie avec Bertin de Silly laissent aux héritiers une situation fort compliquée. Les vastes domaines familiaux s'étendant sur différentes provinces ne sont pas toutes sous la même coutume, la même loi. Disputes, procès, second procès... Tout ce petit monde à couteau tirés en appelle au roi. Henri II, tranche et fait apposer des bornes séparant les terres des uns et des autres renvoyant chacun chez soi dans le confort rudimentaire de leurs châteaux plongés en pleine guerre de religion.
Deux Pouillots siffleurs alarment. L'un des oiseaux est rapidement découvert sur une branche basse le bec chargé de nourriture. Le couple a encore des jeunes au nid – ils ne sont pas en avance : la migration de cette espèce débute généralement en août et si les jeunes ne volent pas encore, monsieur et madame prendront un peu de retard dans leur grand voyage en direction de l'Afrique équatoriale où ils passeront l'hiver.
La lumière décroît au fur et à mesure que les nuées grossissent. Nous en venons même à craindre une averse. Qui serait certes salutaire pour la forêt assoiffée mais qui peut bien attendre la nuit à venir si on nous demande notre avis. La mare que nous visitons – cachée au centre d'une parcelle forestière – est fréquentée par quelques libellules. Deux Anax empereurs, l'une des plus grandes libellules de France, quelques Orthétrums réticulés et une bonne dizaine de Sympétrums sanguins à la livrée rouge sang qui lui a évidemment valu son nom.
Peu avant notre sortie de forêt et notre retour à notre point de départ, nous admirons un arbre exceptionnel. Sans doute l'un des plus gros et plus vieil hêtre du massif forestier de Rambouillet. D'énormes branches partant dans toutes les directions, certaines touchant presque terre et un tronc de près de six mètres de circonférence. La cerise sur la gâteau en cette fin de sortie. La lumière baisse encore et quelques rares gouttes tombent du ciel. On ne parle pas d'averse. Même pas de crachin car aucunes d'elles n'a réellement le temps d'atteindre le sol avant de s'évaporer. Nous rangeons néanmoins le matériel photo, surveillons le ciel avec l'espoir que cela tienne encore un peu et terminons la balade sans anicroche après un périple de 19 km.
Liste des espèces
Oiseaux :
Buse variable, Pigeon ramier, Pic vert, Pic noir, Pic épeiche, Pic mar, Pic épeichette, Hirondelle rustique, Mésange charbonnière, Mésange bleue, Mésange noire, Mésange huppée, Mésange nonnette, Mésange à longue queue, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Merle noir, Fauvette à tête noire, Pouillot fitis, Pouillot véloce, Pouillot siffleur, Gobemouche gris, Accenteur mouchet, Bergeronnette grise, Serin cini, Bouvreuil pivoine, Pinson des arbres
Papillons de jour :
Miroir, Sylvaine, Piéride de la moutarde, Piéride de la rave, Piéride du navet, Piéride du chou, Souci, Citron, Azuré des nerpruns, Tircis, Amaryllis, Myrtil, Tabac d'Espagne, Petit Mars changeant, Petit Sylvain, Vulcain
Libellules :
Caloptéryx vierge, Agrion jouvencelle, Aeschne affine, Aeschne bleue, Anax empereur, Orthétrum réticulé, Sympétrum sanguin, Sympétrum strié
Amphibiens et reptiles :
Grenouille agile, Orvet fragile
Mammifères :
Blaireau européen (traces)
Orthoptères :
Grande Sauterelle verte, Oedipode turquoise, Grillon des bois