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15 mai 2020

Enfin !

Souvenez-vous : c'est ce qu'on appelle une forêt...

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Deux mois. Deux longs mois de confinement nous ont tenus éloignés de cette nature à laquelle nous aspirons tant. De cette verdure, de cette flore, de cette faune que nous aimons qui sont pour nous des sources indispensables d'énergie. Nous y rechargeons nos batteries. Nous y abandonnons stress et soucis que nous changeons en quiétude et émerveillement. Nous attendions cette première sortie avec une impatience sincère. Nous échapper de nos prisons et fouler à nouveau les chemins interdits. Ne plus nous contenter d'en rêver, mais concrétiser nos envies, satisfaire nos besoins. Et partager ensemble ces moments que nous voulons conviviaux.

 

En ce 14 mai, laissant notre frustration derrière nous, nous nous élançons à nouveau en sous-bois. La forêt a beaucoup changé. Mi-mars, nous l'avons laissée dénudée par l'hiver pour la retrouver ce soir parée de ses plus beaux atours printaniers. Chênes et Charmes aussi verts que possible. Aubépines arborant de magnifiques fleurs blanches ou rosées. Digitales ornées de pourpre. Mélampyres piquant les talus de tâches jaune-orangé. Des bourdons striés de noir, d'orange et de blanc vrombissent et butinent ici et là. Des Grillons champêtres stridulent dans les prés en lisière.

 

Et les oiseaux !

 

Le Pouillot véloce compte ses écus et – tel un usurier dans le secret d'une alcôve sombre – empile ses pièces les une sur les autres : « Tsip-Tsap, Tsip-TsapTsip-Tsap,Tsip-Tsap... » Un chant composé de deux syllabes répétées à l'envi faisant du véloce l'une des espèces les plus aisées à identifier à l'oreille. L'autre star est le Rougegorge familier. Un chant bien différent. Nullement rythmé sur deux tons scandés inlassablement, mais au contraire flûté, mélodieux et varié. Au rythme lent que l'on trouve charmeur ou nostalgique. Lorsqu'on a envie de se familiariser avec le chant des oiseaux, ces deux espèces sont intéressantes pour débuter. Le véloce car sa voix est si typique qu'elle n'est généralement confondue avec aucune autre. Et le Rougegorge car il est si commun qu'on le rencontre partout. En forêt, mais aussi dans les parcs urbains et dans les jardins aux abords de nos maisons. Notre oreille n'a donc pas le temps de l'oublier et se familiarise rapidement avec cette mélopée qu'on entend chaque jour ou presque pourvu qu'on y prête un peu attention.

 

Le triangle dans lequel nous nous promenons ce soir (Epernon, Raizeux, Saint-Hilarion) présente un paysage varié. Une kyrielle de petits bois disséminés dans une campagne ouverte. Les lisières sont partout. Petit bois, prés, cordons d'arbres, bois plus importants, parcelles cultivées, boqueteaux, corps de ferme isolé, et quelques haies survivantes du remembrement qui a saccagé des millions d'hectares de bocage depuis les Trente Glorieuses.

 

C'est un paysage que le Loriot d'Europe affectionne particulièrement. Le loriot est un des plus bel oiseau de nos forêts. De la taille d'un merle, il s'en distingue par une livrée jaune d'or qui tranche avec un bec rouge sang et des ailes noir de jais. Des contrastes somptueux mais généralement dissimulés dans l'épaisse frondaison des arbres. Le voir – l'apercevoir – suppose chance et persévérance. Mais il est toutefois fréquent de l'entendre. Un chant extraordinaire qui porte loin. Un très beau sifflement, flûté, modulé, mélodieux. Impossible à confondre. Malheureusement ce soir, le temps ne stimule pas soliste. Si le ciel est clair et sans nuage, un vent glacial coule du nord-est. Après les chaudes journées d'avril, les parkas d'hiver sont ressorties des penderies dans lesquelles nous les espérions remisées jusqu'au mois de novembre. Une fois encore, les Saints de Glace en ont décidé autrement.

 

Les affamés se font entendre...

 

Pour le pique-nique, un conciliabule s'ouvre entre nous. A l'ombre mais l'abri d'Eole ou au soleil les cheveux au vent ? Remontant nos cols au plus haut, nous choisissons le soleil. Le disque descend lentement vers l'horizon mais menace d'être happé par la forêt. Pour le moment, il darde encore et les Alouettes des champs, en vol stationnaire à une vingtaine de mètres du sol, s'époumonent – marquant ainsi leur prévalence sur les quelques acres de terrain survolés. Un flot de notes nous dégringolent sur la tête. Des notes rapides, un peu brouillon. En une cascade ne devant jamais tarir. Pendant ce temps, un drame se joue. Un membre du groupe – nous l’appellerons C. – se débat avec un sandwich au guacamole. La purée d'avocat qui n'a pas envie de terminer dans un estomac, cherche par tous les moyens à échapper à l'appétit dévorant qui le menace. Et nous assistons à une bataille dans les règles de l'art qu'auraient sans nul doute savouré les plus éminents généraux de l'Empire – attaques, feintes et contournements qui s'achève sur une victoire de l'être humain sur le fruit récalcitrant.

 

Ce spectacle achevé, nous reprenons le cours normal de notre sortie. Le soleil a disparu, digéré par les houppiers des grands arbres qui ne le restitueront pas avant le lendemain matin. Le ciel se teinte d'orange et de rose. Au sol, les ombres s'étirent maintenant à l'infini et s'épaississent à chaque instant. La température chute en même temps que la nuit. Les batraciens ne chantent pas, anesthésiés par le froid. Un chevreuil que nous n'avions pas vu détale et s'enfonce dans un bois. Plusieurs de ces traces sont relevées dans la boue humide du chemin.

 

L'obscurité progresse. Le calme s'installe en sous-bois. Les oiseaux se sont tus à l'exception des Rougegorges qui, fidèles à leurs habitudes, chantent tard le soir. Trois ou quatre oiseaux emplissent l'air. Leurs notes s'élèvent dans le silence presque parfait. Pas un bruit ne vient en effet troubler les lieux. Pas un avion (les vols n'ont pas encore repris), pas une voiture (les routes sont éloignées et le trafic encore limité)... Juste notre groupe silencieux pour jouir du concert.

 

A cette saison, la nuit tarde à devenir noire. Longtemps les lueurs du couchant pâlissent l'horizon occidental. Un halo blanchâtre masque encore une grande partie des étoiles. Les plus brillantes percent toutefois la voûte céleste. La constellation du Lion au sud. La Grande Ourse au zénith. L'étoile polaire qui se trouve presque dans l'axe de rotation de la Terre. Et bien sûr Vénus, tel un phare guidant les bateaux vers le port. Dans la tradition, Vénus a d'ailleurs joué ce rôle puisqu'elle est aussi connu sous le nom de l'étoile du berger et a jadis guidé les rois mages. Ce n'est pourtant pas une étoile, mais une planète appartenant à notre système solaire. La seconde en partant du soleil, intercalée entre Mercure et la Terre. Avec des températures au sol comprises entre 440 et 490 degrés Celsius, elle rend la bronzette assez peu agréable et risque d'occasionner certaines rougeurs cutanées.

 

Puis les véhicules sont rejoints. La balade a été très agréable malgré le vent glacé. Agréable de retrouver la forêt. Agréable d'écouter à nouveau les oiseaux. Agréable de partager ces moments de découverte ensemble.

 

Enfin !

 

Liste des espèces

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Oiseaux :

Canard colvert, Faisan de Colchide, Pigeon ramier, Tourterelle turque, Pic épeiche, Alouette des champs, Loriot d'Europe, Corneille noire, Mésange charbonnière, Mésange bleue, Mésange nonnette, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Rossignol philomèle, Merle noir, Grive musicienne, Grive draine, Hypolaïs polyglotte, Fauvette à tête noire, Fauvette des jardins, Pouillot fitis, Pouillot véloce, Pipit des arbres, Étourneau sansonnet, Pinson des arbres

 

Mammifères :

Chevreuil européen

 

Orthoptères :

Grillon champêtre

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