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05 janvier 2020

Une girafe en hiver...

Janvier est de retour…

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Après avoir enterré l’année 2019 et célébré l’avènement de 2020, un groupe se retrouve en forme dans le petit village de Gambaiseuil afin d’arpenter de nouveaux chemins forestiers. Le ciel est gris. La nature dépouillée de sa végétation. Ambiance nettement hivernale – austère. Pourtant le thermomètre reste positif. Point de givre, point de glace. Le froid boude, retranché plus au nord. Quelques fleurs parsèment timidement le bord du chemin – quelques pâquerettes. Des bourgeons grossissent déjà, risquant d’éclater avant la fin de l’hiver. Quelques oiseaux profitent eux aussi de cette douceur anachronique et chantent : Mésanges bleues, Mésanges charbonnières, Accenteurs mouchets…

 

Dans la clairière, des highland cattle paissent paisiblement. Cornes immenses, longs poils très épais. A leurs pieds, des Pinsons des arbres cherchent leur nourriture. Dans un arbre au-dessus du pré, une Sittelle torchepot fouille le lacis de branches à la recherche d’une araignée ou d’un insecte. La lisière franchie, notre groupe s’enfonce en sous-bois et tombe rapidement nez-à-nez avec un hêtre colossal. A la croisée de deux chemins, il semble surveiller les allées et venues des randonneurs dominicaux. Ses branches s’étalent en toutes les directions à la recherche de la lumière dont il se nourrit à la belle saison. Un vénérable qui a probablement connu le règne de Louis quatorzième du nom et procuré de l’ombre à quelques sans-culottes en maraude.

 

Un chant flûté et puissant arrive alors à nos oreilles. Parcelle mêlée de chênes, de charmes et de hêtres choisie par une Grive draine pour domicile. Il est fréquent que cette espèce – la plus grosse des quatre grives européennes – pousse la sérénade au beau milieu de l’hiver. Chaque année, les plus précoces débutent leur saison dès la fin du mois de décembre et profitent des périodes douces de janvier et de février pour dérouiller leurs cordes vocales. Une petite volée de Tarins des aulnes passe au vol en gazouillant et s’éloigne au-dessus des bouquets de bouleaux qui tapissent les bords du petit ru en contre-bas.

 

Nous quittons bientôt le vallon pour gravir la pente sableuse et gagner le plateau. Sur des centaines d’hectares, la chênaie s’étire à l’envi. L’eau stagne sur cette portion du massif forestier et ne peut ni s’écouler en raison de l’absence de pente ni pénétrer dans le sol très lourd et déjà gorgé des précipitations de l’automne. Les chemins sont détrempés. Et labourés par de nombreux sangliers venus nuitamment fouiller le sol à la recherche de vers, de glands ou de racines.

 

Au milieu d’une parcelle, entre pinède aux rangs serrés et boulinière clairsemée, un curieux pin s’élève à la jonction de ces deux mondes. Un arbre avec deux troncs. Deux solides ancrages plantés profondément dans la terre. L’un droit comme un « I », le second coudé pour rejoindre son frère siamois et fusionner avec lui entre deux et trois mètres au-dessus du sol. Une girafe debout sur ses pattes, son cou démesuré s’élevant parmi la jungle des arbres environnants. L’animal est saisi sur la pellicule – sous toutes les coutures. Les photographes peuvent prendre leur temps : pas de risque de voir le mammifère détaler.

 

Entre gadoue et sable blanc…

 

Le groupe repart et s’engage sur un chemin pour le moins humide. Les flaques s’élargissent à chaque pas. Les fossés débordent. Des touffes de roseaux font leur apparition dans le paysage… L’imperméabilité de nos chaussures de marche va être testé dans les hectomètres à venir. Les bottes en caoutchouc relèvent la tête : on les trouvait peu commodes pour marcher, on les jugeait un peu exagérées… Bien sûr que la forêt est mouillée à cette saison – mais tout de même ! Les chaussures de marche abandonnent leur petit air moqueur. Regardent leurs grandes sœurs avec envie. L’eau se fait tout à coup plus profonde. Les chaussures de marche tentent de biaiser. Cherchent des voies alternatives. Sondent pour trouver les hauts fonds. Sautent de touffes d’herbe en îlots végétalisés. Un peu trop sûres d’elles, les bottes passent en force. Au milieu du bourbier comme si elles reliaient au pas de course la Concorde depuis l’Etoile. Mais cette fougue manque de s’achever avec des pieds mouillés. Car au centre d’un passage plus profond que les autres, les bottes se plantent, restent engluées dans la vase et manquent de peu de devenir aquarium – de boire la tasse. Les chaussures de marche – magnanimes – se portent immédiatement à leur secours, agrippent des mains, guident lentement vers le gué et tirent les bottes de ce mauvais pas.

 

Le bourbier est franchi ! Humidité au niveau de certains orteils. Pantalons maculés jusqu’à mi-cuisses. Mais revenu au sec, le groupe s’amuse de la péripétie. 

 

Et l‘aventure creuse. La pause déjeuner est votée à l’unanimité au pied d’un chêne couvert de mousse. La lumière – ténue – coule du ciel blanc et éclaire l’arbre. Le contre-jour dessine ses branches. Souligne leur teinte verte. On croirait un chêne tout droit sorti d’un roman de Tolkien.

 

L’après-midi tranche avec la matinée. Plus lumineuse. Avec des trouées de ciel bleu. Plus sèche aussi avec des peuplements de résineux poussant les pieds dans le sable. La gadoue cède du terrain. Aux abords des rares flaques, nous découvrons de profondes empreintes. Larges et longues. Un cerf nous a précédé de quelques heures. Ou de quelques jours. Les traces, bien nettes sont toutefois récentes. On se prend à inspecter la forêt environnante. Un coup de jumelles ici, un autre là. Mais l’animal est déjà loin.

 

Plainte du Pic noir : long cri, puissant, reconnaissable entre tous. L’oiseau est posé sur notre droite. Sans doute collé à un tronc, invisible. Lui a dû nous voir et signale notre présence. Le pic s’envole en poussant des cris aigus, répétés. Et se perd dans le lointain. L’espèce n’est pas rare en forêt de Rambouillet, mais sa rencontre est chaque fois un moment privilégié.

 

Le retour nous ramène vers des sous-bois que l’hiver a mis à nu. Des chênes – pédonculés et sessiles –, des charmes, des châtaigniers, des érables, des alisiers qu’on identifie aux feuilles mortes qui jonchent le sol. Et quelques Chênes d’Amérique apportés là. Nous rejoignons les véhicules après quatorze kilomètres de marche. Heureux de cette première sortie de l’année 2020 qui lance une nouvelle saison.

 

Bonne année à tous !

 

Liste des espèces

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Oiseaux :

Pigeon ramier, Tourterelle turque, Pic vert, Pic noir, Pic épeiche, Pic mar, Corneille noire, Pie bavarde, Geai des chênes, Mésange charbonnière, Mésange bleue, Mésange huppée, Mésange nonnette, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Merle noir, Grive mauvis, Grive draine, Roitelet huppé, Bergeronnette des ruisseaux, Moineau domestique, Grosbec casse-noyaux, Tarin des aulnes, Bouvreuil pivoine, Pinson des arbres

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