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23 novembre 2019

Matinée à Saint-Hubert...

Ce matin le ciel pleure…

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S’épanche sur les chaudes journées d’été qui ne survivent plus que dans nos souvenirs nostalgiques. Sur novembre qui glisse dangereusement vers décembre en cette fin de mois. Sur la forêt assoiffée par un été torride. Car si l’automne est pluvieux et que la plupart des chemins forestiers sont envahis de boue, les niveaux d’eau des étangs restent bas. Beaucoup de mares forestières sont même encore à sec.

 

Rambouillet a encore besoin d’eau.

 

De fortes pluies ont cinglé les vitres une grande partie de la nuit. Au lever du jour, alors que le soleil reste camouflé derrière une épaisse couche nuageuse, un crachin écossais a pris le relais – pas de raison que les bretons et les normands soient les seuls à prendre ! Précipitations qui cessent alors que la sortie débute.

 

La double haie entre laquelle nous avançons est percée de deux ouvertures. La première sur la gauche, ouverte sur l’étang de Corbet. Pièce d’eau couverte d’une vaste roselière et riche en oiseaux paludicoles. A notre arrivée, des Grandes Aigrettes décollent et s’éloignent d’un vol majestueux. De la taille d’un Héron cendré, d’un plumage blanc immaculé, de longues pattes noires et un puissant bec orange. Un oiseau splendide qui hiverne sur la chaîne des étangs en nombre toujours croissant d’année en année. Deux, quatre, six, huit, dix, douze… Vingt-huit oiseaux volent au-dessus de l’étang. Un spectacle très rare voici dix ans et qui devient de plus en plus fréquent : la Grande Aigrette est en effet l’une des rares espèces à voir ses effectifs progresser en Europe. Trois ou quatre Hérons cendrés demeurent immobiles. Les jambes dans l’eau, les oiseaux affûtent les poissons dont ils se nourrissent. Se fondent dans le décor. Se font oublier. Pour harponner leur proie qui, inconsciente du danger, vient nager trop près.

 

Dure loi de la nature.

 

Une belle bande de Canards souchets stationnent également sur les eaux stagnantes. Leur bec en forme de spatule leur permet de filtrer l’eau de surface et de capturer les fines particules végétales, les plus petits crustacés et mollusques en suspension. Lorsque les oiseaux nous survolent, leurs larges becs noirs se détachent sur les nuées grises. La bande ventrale rousse distingue le mâle, plus coloré que la femelle. Des Grands Cormorans au plumage noir de jais sont perchés dans les bouleaux au milieu de l’espace ouvert de l’étang. Malgré leur taille – et leur poids – l’espèce posent fréquemment dans la végétation riveraine. Et quoi qu’on en dise, tout n’est plus alors qu’une question de taille – celle de la branche sur laquelle repose l’oiseau.

 

La seconde ouverture – sur notre droite – débouche sur l’étang de Pourras. L’ambiance n’est pas la même. Le vent de nord-est fouette nos visages rougis. L’humidité omniprésente ruisselle de chaque branche, de chaque brindille. Les épis des roseaux brillent malgré la faible lumière grisâtre qui parvient à traverser les nuages. Sur les eaux ridées par Eole, une dizaine de Cygnes tuberculés nagent de façon nonchalante. Les adultes au plumage blanc. Les jeunes maculés de brun. Les vilains petits canards ont bien grandi depuis le printemps. De la même taille que leurs parents mais gardant encore des plumes juvéniles.

 

La forêt…

 

Le long du bois que nous longeons maintenant, l’air se charge encore davantage d’humidité. De fines gouttelettes en suspension accompagnent maintenant la brise. Une petite bruine délave le paysage. Ternit les couleurs encore vives du sous-bois. Les jaunes s’estompent. Les roux pâlissent. Les verts disparaissent. Des Sittelles torchepots piaillent dans les branches des grands chênes. Des Geais glanent au sol des glands pour les stocker dans des caches. Et en oublier certaines comme l’écureuil oublie l’emplacement de ses réserves… Et ainsi participer à la régénération de la forêt. Un Pic épeiche crie depuis le houppier d’un grand chêne chauve. Petites séries de notes aiguës et métalliques, scandées sur un rythme lent. L’oiseau demeure malheureusement invisible dans l’écheveau inextricable de branches noircies de pluie.

 

Au virage d’un chemin, nous découvrons les vestiges d’un petit bâtiment cubique. Ouvert aux quatre vents, sans ni porte ni toiture. Tout ce qu’il reste du pavillon de chasse de Napoléon Ier, bâti en 1808 et déjà en ruine à la moitié de ce même siècle. Le sentier débouche sur une nouvelle digue de pierre enjambant les étangs. Les deux pièces d’eau les plus orientales de la chaîne qui en compte six et que Louis XIV a fait creuser pour alimenter les fontaines de Versailles.

 

Chant explosif de la Bouscarle de Cetti. Une espèce sédentaire et frileuse qui a beaucoup souffert des hivers froids des années 1980 et qui reprend doucement du poil de la bête en Ile-de-France depuis la seconde moitié des années 1990. D’autres Grandes Aigrettes pêchent le long des roselières. Probablement entre 35 et 40 oiseaux sont visibles ce matin, ce qui aurait constitué un effectif inimaginable il y a seulement dix ans et qui est maintenant presque banal.

 

Les grands arbres se déplument. Même si la chute des feuilles n’est pas un phénomène rare à cette saison, le vent des derniers jours a accéléré le processus. Le sous-bois, protégé du souffle, reste par contre très coloré. Particulièrement les hêtres et quelques châtaigniers qui semblent éclairés par un projecteur. Rouge, jaune, ocre, un reste de vert. Les Hêtres multiplient les couleurs chaudes qui tranchent vivement avec les autres espèces beaucoup plus ternes. La forêt est féerique.

 

C’est sur cette note colorée et humide que la sortie d’achève. La pluie, après nous avoir cherché à fini par retrouver notre trace. De belles observations dans un cadre somptueux aux couleurs d’automne qui cette année joue les prolongations pour le plus grand plaisir de nos yeux.

 

Liste des espèces

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Oiseaux :

Grèbe castagneux, Grèbe huppé, Grand Cormoran, Héron cendré, Grande Aigrette, Cygne tuberculé, Bernache du Canada, Canard colvert, Canard chipeau, Canard souchet, Fuligule milouin, Faisan de Colchide, Râle d'eau, Gallinule poule-d'eau, Foulque macroule, Mouette rieuse, Pigeon ramier, Martin-pêcheur d'Europe, Pic épeiche, Pic mar, Corneille noire, Geai des chênes, Mésange charbonnière, Mésange nonnette, Mésange à longue queue, Sittelle torchepot, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Merle noir, Grive mauvis, Grive musicienne, Bouscarle de Cetti, Accenteur mouchet, Pipit spioncelle, Étourneau sansonnet, Pinson des arbres, Bruant jaune, Bruant des roseaux

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