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12 octobre 2019

Du soleil à

travers le brouillard...

Début de sortie bien gris…

Lumière rasante d’une matinée qui débute par une météo agréable. Ciel clair. Quelques écharpes de nuage passent rapidement, emportées par un vent modéré soufflant du sud-est. Le fond de l’air n’a rien de chaud. L’automne – maintenant bien installé – règne en maître et ne concède plus rien à un été finissant.

 

Le long du chemin menant à l’étang, de nombreux passereaux s’envolent à notre arrivée : Bruants jaunes, Pinsons des arbres, Merles noirs, Grives musiciennes… Trois ou quatre Rougegorges familiers chantent – mélopées sifflées et aiguës emplissant l’air de notes empreintes de nostalgie.

 

Débouchant sur le plan d’eau, notre groupe découvre un bel étang de près d’un kilomètre de long pour trois ou quatre cent mètres de large. Comme les cinq autres complétant la chaîne des étangs de Saint-Hubert, il a été creusé au XVIIe siècle sur ordre de Louis XIV désireux de posséder au cœur de son jardin les plus beaux jets d’eau qu’on puisse imaginer. La plus grande zone humide du sud du département des Yvelines a en effet la mégalomanie d’un seul homme pour origine.

 

Le niveau d’eau reste bas en cette mi-octobre. Malgré les pluies de ces dernières semaines, les effets de la sécheresse estivale se font encore amplement sentir. La plupart des roselières de l’étang n’ont plus les pieds dans l’eau. D’étroites bandes de vases s’observent d’ailleurs ici et là en bordure. Cet assec est bénéfique pour la végétation. Particulièrement pour les roseaux qui en ont besoin afin de s’étoffer.

 

Le ciel se charge de nuages bas. Un pâle soleil traverse la crasse et se reflète dans une eau zébrée par le vent. Les larges feuilles de nénuphars sont elles aussi agitées. Le contre jour a quelque-chose d’envoûtant. Un Héron cendré décolle. Des aigrettes au plumage blanc immaculé pêchent elles aussi dans une eau peu profonde. Des Grandes Aigrettes d’abord, de la taille du Héron cendré. Huit ou neuf oiseaux sont visibles. Immobiles, le cou arqué près à harponner un poisson imprudent. Des Aigrettes garzettes ensuite. Un bon tiers plus petit que les premières. Nous en comptons sept, ce qui constitue un nouveau record pour le massif de Rambouillet.

 

Des Martins-pêcheurs crient sans cesse. Leurs cris aigus résonnent tout autour de la digue. Sur notre gauche d’abord, puis derrière nous. Lorsque deux oiseaux se montrent enfin et passent au vol tels deux fusées bleu électrique au ras de l’eau. Un des oiseaux les plus colorés d’Europe et visibles toute l’année sur ces étangs. L’espèce ne quitte les lieux qu’en cas de gel prolongé qui la condamnerait à la famine.

 

Même si les premières gelées sont sans doute encore assez loin, le froid devient plus vif à cet instant. L’atmosphère se charge brutalement d’humidité. Le soleil disparaît tout à fait, happé par une épaisse couche de brouillard tombée en quelques minutes. La luminosité chute. La météo devient tout à coup hivernale. Des nuées grises roulent lourdement, lèchent les roselières et les saules au bord de l’eau. Le vent nous fouette le visage. Gèle nos mains nues. Les douces températures annoncées par la météo nous ont incitées à ne pas trop nous couvrir. Nous regrettons maintenant nos épaisses parkas des mauvais jours, nos bonnets et nos gants. L’humidité glacée nous transperce de part en part.

 

En plaine, le vent est omniprésent. Les toiles d’araignée sont partout constellées de fines gouttelettes. La végétation détrempée ruisselle faiblement. Des bandes de petits oiseaux passent sans cesse au vol. La migration bat son plein. Des dizaines de Pipits farlouses fuient vers le sud. Des Alouettes des champs arrivent elles aussi du nord de l’Europe. Leurs contingents vont progressivement augmenter dans les jours à venir pour culminer entre le 20 octobre et le 10 novembre.

 

Puis c’est l’embellie…

 

C’est avec soulagement, que notre groupe retrouve le couvert végétal du sous-bois. Le vent s’épuise sur les houppiers et échoue à pénétrer la forêt. Au sol, l’air reste immobile. Le froid devient alors plus relatif. Un Pic vert laisse éclater son rire tandis que la plainte du Pic noir retentit sur notre droite. Les longs sifflements des Grosbec casse-noyaux tombent du haut des grands chênes d’où les oiseaux viennent de s’envoler.

 

Sur la digue suivante, le temps s’éclaircit. Eole, à force de s’époumoner, lave peu à peu le ciel. La lumière revient. Timidement d’abord, puis plus forte. Le paysage recouvre ses teintes. Le jaune reparaît. Les verts retrouvent leurs nuances. L’eau n’est plus une surface noire mais reflète à nouveau les tons variés des nuages.

 

Devant la digue de pierres, une jeune Mouette rieuse pêche longuement. Arrive au vol, rase l’eau sur laquelle elle semble marcher et picore la surface de son bec. A droite, à gauche, devant elle. Attrape du menu fretin dont elle se nourrit. Remonte, fait un tour au vol et recommence son manège. Trois fois. Quatre fois. Dix fois… Un sujet de choix pour les photographes !

 

De nouveau en forêt, le chemin du retour traverse une belle futaie de grands chênes. Le vert domine encore largement mais les troncs larges et les branches des houppiers teintés de noir par l’humidité tranchent. Des touches d’ocre apparaissent chaque jour plus nombreuses. Les Alisiers torminaux se sont embrasés. Tous les pieds de cette espèce étincellent de jaune, d’orange ou de rouge. Il est aisé de les repérer dans l’océan chlorophyllien.

 

Magnifique tableau qui va encore se magnifier dans les semaines à venir.

 

Dans la dernière clairière avant de boucler notre boucle, la crasse se déchire enfin. Les rayons du soleil s’engouffrent dans la brèche et inondent la campagne. La lumière s’invite partout. Souligne la végétation. Sature enfin les couleurs.

 

Et réchauffe rapidement l’air !

 

Les vestes s’ouvrent puis tombent. La douceur est appréciée de tous. Par notre groupe d’humains mais aussi par les insectes qui n’attendaient que quelques degrés supplémentaires pour sortir de leur cachette. Un magnifique papillon jaune orangé est le premier à déployer ses ailes peu après midi. Il virevolte. Pose et butine quelques fleurs. Se laisse prendre en photo. Et s’éloigne. Un second est aperçu peu après. Des piérides – papillons blancs tachés de noir – montrent à leur tour le bout de leur trompe. Des Piérides de la rave croisent des Piérides du navet.

 

Quelques libellules sortent également. Un Sympétrum sanguin – une libellule rouge sang (au risque d’enfoncer une porte ouverte). Un Leste vert – une petite libellule verte (oui, je sais). Ou encore une femelle d’Aeschne bleue – une grosse libellule… verte (la femelle n’est en fait pas bleue… Les dames ne sont pas toujours là où on les attend).

 

Notre périple en direction du sud s’achève. Ayant débuté avec une météo écossaise, nous avons transité par les Côte d’Armor puis le Morbihan. Le soleil devenant généreux, nous touchons en fin de sortie aux rivages du Médoc. Beaucoup d’espèces. Et de bien belles observations dans un des plus beaux cadres de la forêt de Rambouillet.

 

Où sont passées mes lunettes de soleil ?

 

Liste des espèces

Oiseaux :

Grand Cormoran, Héron cendré, Grande Aigrette, Aigrette garzette, Cygne tuberculé, Bernache du Canada, Canard colvert, Sarcelle d'hiver, Canard pilet, Canard souchet, Épervier d'Europe, Faucon crécerelle, Râle d'eau, Gallinule poule-d'eau, Foulque macroule, Vanneau huppé, Chevalier culblanc, Goéland leucophée, Mouette rieuse, Pigeon colombin, Pigeon ramier, Martin-pêcheur d'Europe, Pic vert, Pic noir, Pic épeiche, Alouette des champs, Corneille noire, Choucas des tours, Pie bavarde, Geai des chênes, Mésange charbonnière, Mésange bleue, Mésange nonnette, Mésange à longue queue, Sittelle torchepot, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Tarier pâtre, Merle noir, Grive musicienne, Grive draine, Bouscarle de Cetti, Pouillot véloce, Accenteur mouchet, Pipit farlouse, Pipit spioncelle, Bergeronnette grise, Bergeronnette des ruisseaux, Étourneau sansonnet, Moineau domestique, Grosbec casse-noyaux, Verdier d'Europe, Chardonneret élégant, Tarin des aulnes, Linotte mélodieuse, Bouvreuil pivoine, Pinson des arbres, Bruant jaune, Bruant des roseaux

 

Odonates :

Leste vert, Aeschne bleue, Sympétrum sanguin

 

Papillons de jour :

Piéride de la rave, Piéride du navet, Souci

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