top of page

78

01 octobre 2019

Sous une averse d'étoiles ! 

Jeu de lumières…

​

Météo fort perturbée durant toute l’après-midi. Régime de type « giboulées d’octobre » avec des grains noyant la campagne à intervalles réguliers. On consulte la météo qui n’est guère optimiste. On connait : on préfère noircir le trait pour au final avoir une bonne surprise en cas d’erreur. L’inverse est moins commercial et engendre des douches froides – dans tous les sens du terme. Une fois de plus nous passons outre et la sortie est maintenue.

 

Sur place, une lumière d’une grande douceur illumine le sous-bois, dessine les touffes de bruyères, miroite à travers les branchages. Une grosse libellule chasse le long de la lisière. Au vol vers la droite, puis vers la gauche. Entrecoupé d’accélérations fulgurantes. Un insecte magnifique qui pose rarement et qu’il est difficile de photographier : une Aeschne bleue.

 

Quelques nuages de beau temps s’invitent dans le ciel bleu. Loin des nuées annoncées et sensées s’épancher copieusement sur le département durant la soirée. Le sentier sableux est marqué d’empreintes. Cerfs, biches, quelques sangliers fréquentent le secteur. Les fougères se parent d’automne comme partout en forêt depuis une quinzaine de jours. Bruyères et ajoncs jettent ici et là des taches de couleur. Coups de pinceaux transformant la forêt en œuvre d’art.

 

Des Pigeons ramiers traversent le ciel de leur vol lourd. Grimpereaux des jardins, Mésanges bleues et Mésanges charbonnières piaillent depuis le houppier d’un grand chêne. Troglodytes mignons et Rougegorges familiers plus près du sol dans les buissons et bois mort à terre. Chacun sa niche écologique.

 

Un cri nasillard tombe alors du ciel. Un cri typique qui identifie immédiatement l’oiseau venant de passer au-dessus de nos têtes : un Tarin des aulnes. Le premier de l’automne. Bien d’autres arriveront en forêt au cours des semaines à venir – une espèce commune entre octobre et mars.

 

En lisière d’une clairière, une biche et son faon de l’année grignotent une herbe jaunie par la sécheresse estivale. Il est 19h10 et le soleil est encore au-dessus des arbres. Les deux animaux – surpris de nous trouver là si près – nous dévisagent intensément. Oreilles braquées dans notre direction. Cherchant à percevoir nos odeurs que le vent faible emporte heureusement dans une autre direction. Observation mutuelle durant trois ou quatre minutes.

 

Photos !

 

Les animaux finissent par s’éloigner. Sans peur, davantage par prudence. Au pas, la mère et son minot gagnent l’autre côté de la clairière. Et s’y installent un moment. Tandis que le faon dîne de ce qu’il trouve à sa portée, la biche se hisse sur ses pattes arrière pour atteindre les feuilles des premières branches d’un grand châtaignier. Qu’ont-elles de meilleur que celles plus basses ? Un débat s’installe au sein du groupe sur ce sujet sans qu’une solution satisfaisante n’apparaisse.

 

Long brame, puissant derrière nous. Une voix grave de baryton emplit la nuit. Il est 19h35. La biche n’a pas bougé. Concentrée sur son châtaignier dont elle poursuit l’effeuillage, Bambi à ses côtés. Mais les nuées sombres qui s’accumulaient depuis un certain temps crèvent à ce moment précis. Quelques gouttes éparses d’abord, rapidement suivies par l’averse en bonne et due forme. Nous quittons notre poste d’observation pour nous réfugier sous un châtaignier – décidément l’arbre de la soirée. Ses larges feuilles nous abritent efficacement. L’ondée cesse quinze minutes plus tard et nous abandonnons notre parapluie végétal au moment où l’eau qui ruisselle depuis le sommet atteint les branches basses.

 

La nuit se referme…

 

Au loin, une Chouette hulotte chante. Ses notes retentissent claires dans la nuit maintenant dégagée.

 

A 20h00, à la lueur d’une faible lune en croissant, le grand cerf sort du sous-bois. Il reste à l’orée des premiers arbres durant quelques minutes. Inspecte les lieux. Broute l’herbe sous les grands chênes. Puis s’avance au centre de la prairie. Une silhouette massive enveloppée de nuit. Il n’est malheureusement plus heure du détail mais celle de l’impression. Nous percevons d’autres mouvements proches. Des biches sont également sorties. Le roi trône au milieu du harem. En mâle dominant, il fait savoir qu’il est là : un brame rauque retentit. « Notre » cerf entonne sa partition, répondant au premier soliste qui continue de gueuler de loin en loin derrière nous.

 

Mais les animaux disparaissent rapidement. Remontant tous en forêt. Ont-ils eu peur – de quoi ? Avaient-ils un truc prévu ce soir là – une soirée Tupperware chez la première biche ? Après avoir attendu en vain quelques minutes le retour des animaux, nous nous éloignons à notre tour afin de poursuivre la sortie à la lueur de nos lampes torche. En sous-bois, la nuit profonde se referme entièrement sur le promeneur noctambule. La faible lumière de notre satellite incomplet ne perce pas la végétation. Ne parvient pas jusqu’au sol.

 

Arrêt au milieu de nulle-part. Extinction des feux afin de nous immerger corps et âme dans l’obscurité. La magie de la nuit opère. L’ouïe se substitue à la vue. Un sixième sens prend lui aussi le relais. L’impression, la divination – la perception presque intime des choses qui nous entourent. Nous ne sommes plus comme en plein jour de simples promeneurs dans une forêt qui reste étrangère. De nuit, nous lui appartenons. Nous devenons un élément des lieux et interagissons avec tous les autres bien plus profondément. Comme si la vue nous tenait à l’écart et que cette cécité nous en rapprochait.

 

Les Chouettes hululent avec ardeurs. Deux mâles s’affrontent et rivalisent de prouesses. Leurs chants résonnent la nuit. Le concert est prodigieux et nous l’écoutons durant de longues minutes. Sans velléité de reprendre notre marche. Pourtant, nous parvenons à nous arracher au spectacle. A l’instant où nous rallumons nos lampes pour guider nos pas sur le chemin pierreux, un aboiement apeuré troue le silence. Très proche. Quelques dizaines de mètres au plus. L’animal détale rapidement en continuant de protester farouchement.

 

Un chevreuil !

 

Sa peur s’estompe bientôt dans le lointain et nous reprenons la route sous une voûte étoilée. Les belles d’été n’occupent plus le zénith mais luisent encore une partie de la nuit : Véga, Deneb et Altaïr constituent un met de choix dans le ciel noir. Au nord, Cassiopee, Pégase et Andromède. A l’ouest, la Grande Ourse. Des pins en rangs serrés barrent tout l’horizon sud.

 

Peu avant de boucler la boucle et de rejoindre nos véhicules, le marquage olfactif d’un renard nous agresse les narines. Une odeur très forte, impossible à confondre que le renard dissémine un peu partout sur son territoire. Maître Goupil est passé par là. La sortie s’achève sans nouvelle pluie. Le vent est lui aussi resté bien sage. Une belle nuit piquée d’étoiles va se poursuivre alors que nous aurons regagné nos pénates respectifs.

 

Liste des espèces

​

Oiseaux :

Pigeon ramier, Chouette hulotte, Pic vert, Pic épeiche, Hirondelle rustique, Geai des chênes, Mésange charbonnière, Mésange bleue, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Merle noir, Grive draine, Pouillot véloce, Accenteur mouchet, Grosbec casse-noyaux, Tarin des aulnes, Pinson des arbres

 

Mammifères :

Cerf élaphe, Renard roux

 

Amphibiens :

Crapaud commun

 

Odonates :

Aeschne bleue

P1480391.JPG
P1480411.JPG
P1480410.JPG
P1480403.JPG
P1480433.JPG
P1480412.JPG
P1480422.JPG
bottom of page