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27 septembre 2019

Que de monde ! 

Le bleu domine

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Ciel d’azur en début de soirée. Du bleu partout jetant sur la forêt une douce lumière dorée. Les bruyères étalent leurs minuscules fleurs de couleur parme. Les premières feuilles jaunies tachent le sous-bois encore vert. Le vent – presque nul – laisse les houppiers en paix. Une fois de plus, la météo s’est montrée exagérément alarmiste. La paix qui règne ce soir est pour nous une agréable surprise.

 

Plus loin, le long du sentier sur lequel le groupe chemine, les fougères étincellent. Jaunes d’or ou rousses en pleine lumière, mordorées pour celles qui étalent dans le contre-jour leurs immenses feuilles dentelées. Difficile de dégoter un sujet plus photogénique. Les déclencheurs crépitent et les photos s’insèrent sur les cartes mémoire des appareils photos.

 

Dans les arbres, des Mésanges à longue queue piaillent. Des trilles courtes et rapides. Répétées à l’envi. Des Pouillots véloces Grimpereaux des jardins et Rougegorges familiers donnent eux aussi de la voix depuis les buissons, arbustes et arbres. Plus de chant comme au printemps, mais tout un ensemble de communications entre les individus – « Maman, où es-tu ? », « Ici, mon chéri », « Y a plus de moucheron dans le placard », « va voir au bout de cette branche, j’en aperçois… »

 

Vers 19h30, un cerf pousse un coup de gueule. Bref mais distinctement. Dans le marais sur notre gauche. Assez loin de nous. A moins qu’il ne nous tourne simplement le dos et bramant pour les antipodes. Pas de début en fanfare. Pas d’entrée fracassante des grands mâles ayant à cœur de hurler leur suprématie. En cette fin de septembre, plus personne ne la leur conteste. Les jeunes s’écartent à leur arrivée, avec crainte et résignation.

 

Un vent léger mais constant s’est levé. La tête des arbres ondule doucement. Les bouleaux frémissent – bruit cliquetant de feuilles. Les cerfs – deux ou trois individus – brament de loin en loin. Des raires puissants à intervalles réguliers. Mais pas de longues phrases passionnées.

 

Arrivés en bordure de clairière, nous découvrons un photographe en poste au bord du chemin. Ne prenant aucune précaution particulière pour se dissimuler. Visible à plusieurs centaines de mètres à la ronde. Difficile d’imaginer les cerfs sortant à découvert sous le nez d’un guetteur aussi peu discret – armé d’une boite à image, mais qui pourrait fort bien tenir une carabine. Le cerf dominant – le seigneur de cette place de brame – n’a atteint cet âge que parce qu’il s’est montré prudent, n’a jamais accepté les bonbons des personnes qu’il ne connaissait pas.

 

Mal parti pour assister au spectacle…

 

Nous nous mettons toutefois en position. Restant dos à la végétation, dans l’obscurité du sous-bois. Utilisant les accidents du terrain pour nous dissimuler autant que possible. Afin de voir sans être vus. L’attente débute. Menace de se prolonger.

 

Le calme règne. Des cerfs brament toujours autour de nous. Une voix lointaine. Une proche. Ambiance d’automne avec la nuit qui tombe de plus en plus tôt chaque soir. Une grande douceur humide enveloppe les lieux. Immobiles depuis près de trente minutes, nos corps ne tressaillent pourtant pas de froid.

 

La situation se débloque

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Notre photographe ne se révèle pas être un parangon de patience. Peu avant 20h00, il jette l’éponge, descend de son piédestal, remballe son matériel et repart dans sa grosse voiture garée à moins de dix mètres de son poste d’observation. Son départ est le signal que les mammifères – les cerfs et nous – attendaient. A peine dix minutes plus tard, deux biches adultes traversent la clairière sans hâte. Un cerf brame plus loin, et ces dames semblent répondre à l’appel. Nous craignons que le mâle dominant ne se soit déplacé. Et qu’il ne brame pas devant nous ce soir. Les biches ont disparu et la clairière reste vide.

 

Deux Chouettes hulottes entrent alors en scène. Les hululements du mâle, les cris aigus de la femelle en réponse. Dans la nuit claire qui tombe alors, ce chant roule au-dessus de la forêt. Ambiance magique. On attend l’apparition du bestiaire fantastique des contes. Un faune, une fée, un lutin. Une licorne. Tout nous semble possible tant l’atmosphère de la nuit diffère de celle de la journée.

 

A 20h30, alors que la nuit s’épaissit, un coup de jumelles en direction de la lisière nous montre des animaux sortis se nourrir sans que nous ne les ayons vus ni entendus. Une biche, une seconde, une troisième… Un jeune cerf mange lui aussi au milieu de la harde. Nous le perdons rapidement de vue. Au moins neuf animaux – huit biches – dînent sous nos yeux. Nos jumelles nous permettent encore de très belles observations malgré le peu de lumière.

 

Que de monde !

 

Le grand cerf ne peut pas être loin – il ne s’éloigne jamais des dames en cette saison. Un brame tout proche nous renseigne bientôt. Une voix rauque sur notre droite. On l’imagine approchant d’un pas martial. La tête haute, ses grands bois en couronne au-dessus de sa tête. Mais la nuit est trop sombre maintenant et nous ne distinguons plus rien d’autre que de vagues silhouettes. Et uniquement lorsque celles-ci sont en mouvement.

 

Les frissons apparaissent. Il est temps de reprendre notre marche et de nous réchauffer un peu. La nuit est maintenant très noire et le brame ne se limite plus qu’à de rares coups de gueule. A la lueur de nos lampes de poche, nous observons les arbres et les arbustes qui jalonnent notre parcours. Chênes sessiles et Chênes pédonculés. Noisetiers. Charmes. Genêts. La botanique de nuit est inhabituelle. L’étoile polaire brille au nord (si, si !). Cassiopée et son célèbre « W » non loin de là sur la droite. La Grande Ourse joue à cache-cache avec les branches d’un grand Pin sylvestre. La forêt n’est pas le lieu le plus indiqué pour une soirée d’astronomie. Au-dessus de l’est, le carré de Pégase est amputé de son étoile la plus basse, dissimulée sous l’horizon. La constellation d’Andromède lui est intimement liée. On découvre rapidement la galaxie du même nom. Tache laiteuse, diffuse qu’on observe à l’œil nu dans un ciel très noir. Mais aujourd’hui un vague halo blanchâtre noyé dans la lueur orangée de l’agglomération parisienne et qu’on n’aperçoit ce soir qu’aux jumelles.

 

Après un dernier brame au loin, nous atteignons les véhicules et bouclons la boucle. Avec de belles images en tête. Des animaux dans nos souvenirs et – espérons-le – sur la pellicule photo. Une belle soirée étoilée qui a de nouveau tenu ses promesses.

 

Liste des espèces

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Oiseaux :

Héron cendré, Canard colvert, Buse variable, Pigeon ramier, Chouette hulotte, Corneille noire, Geai des chênes, Mésange nonnette, Mésange à longue queue, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Pouillot véloce, Roitelet huppé

 

Mammifères :

Cerf élaphe

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