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29 septembre 2019

Attention : zone humide !

De l’eau…

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Il était une fois deux haies d’aubépines. Trois bon mètres de haut. Aux feuilles encore vertes. Encadrant une petite route sur laquelle plus aucun véhicule ne circule. Le goudron s’effrite. La nature reprend ses droits. Des trouées laissent apparaître des étendues d’eau et de vastes roselières. A gauche comme à droite. Nous marchons sur une digue séparant deux étangs. Et pénétrons au cœur d’une des plus belles zones humides franciliennes.

 

Débouchant sur le point de vue, l’étang s’ouvre devant nous. Près d’un kilomètre de long, Trois ou quatre cents de large. Le niveau d’eau est très bas après la sécheresse estivale. Des touffes de nénuphar couvrent l’eau du chenal qui s’étire à nos pieds. Leurs grandes feuilles agitées par le vent qui souffre du sud-ouest. A notre arrivée, quelques oiseaux décollent – ceux posés le plus près de la digue. Un Héron cendré – grand oiseau gris au long bec emmanché d’un long cou. Une Aigrette garzette – petit héron au plumage blanc immaculé. Quelques dizaines de Canards colverts.

 

Le paysage ce matin est froid. Tons bleutés. Camaïeu de gris. Météo automnale bien loin des jours ensoleillés de l’été. Pas de pluie pour le moment, mais des nuées d’anthracites roulent dans un ciel bien tourmenté. Et menacent un peu plus nos échines à chaque instant. Le Héron cendré et l’Aigrette garzette se sont posés un peu plus loin. Une Grande Aigrette – un grand héron blanc – passe au vol et vient se poser non loin de la garzette. Idéal pour comparer la différence de taille qui existe entre les deux espèces.

 

Un long cri aigu retentit alors et précède de quelques secondes une flèche bleue – l’une des stars des lieux : un magnifique Martin-pêcheur d’Europe passe au vol à grande vitesse. Au ras de l’eau. Le bec proéminent en forme de poignard. Plumage bleu rayant prestement le paysage terne. Disparu aussi vite qu’il est venu.

 

Des ronds concentriques apparaissent bientôt à la surface de l’eau. Quelques-uns isolés d’abord, puis en grand nombre. L’averse ne s’est pas fait attendre. Nous nous abritons sous les aubépines. Remparts bien ténus qui ne nous protègent que quelques minutes. La pluie ruisselle rapidement sur les feuilles et nous trempe aussi surement que si nous étions restés sous l’ondée.

 

Ce qu’il y a de bien avec la pluie lorsqu’elle tombe suffisamment fort comme ce matin, c’est qu’elle ne nous gêne que durant les quinze premières minutes. Au-delà, une fois trempés, une sorte de détachement résigné gagne les rangs : ce qui est advenu n’est plus à craindre.

 

Le chant brusque de la Bouscarle de Cetti explose sur notre gauche, preuve supplémentaire que l’averse est finalement une bonne nouvelle pour cette nature assoiffée. Le second quart d’heure de pluie est ainsi vécu avec une philosophie toute bretonne. Le groupe est toutefois soulagé lorsque la pluie cesse enfin. Le rideau terne qui avait avalé les couleurs du paysage s’évacue vers le nord-est. Les roseaux retrouvent leurs nuances de vert. L’eau son bleu-nuit. La lumière s’accroît.

 

Et quelques couleurs à travers le rideau de gris…

 

Un grand oiseau apparaît dans le ciel à ce moment-là. Un grand rapace, tête blanche barrée d’un masque noir. Un Balbuzard pêcheur – 1.70 mètres d’envergure. L’oiseau sillonne le ciel au-dessus de l’eau, l’œil rivé sur la surface à la recherche d’un poisson nageant à faible profondeur. Lorsqu’il en aura repéré un, il se placera en vol stationnaire, calculant son coup pour plonger aussitôt serres en avant et attraper sa proie.

 

Mais pour le moment, il tourne. Sans paraître trouver ce qu’il cherche. Derrière nous, dans les arbres de la digue, le cri d’un Torcol fourmilier se fait entendre. Le Torcol est une espèce rare en Ile-de-France. Il migre en très petit nombre et souvent de façon discrète : la rencontre d’aujourd’hui est une chance !

 

Le long du chemin que nous suivons en lisière, une bruine londonienne nous surprend alors que nous admirons les premières teintes d’automne. Des feuilles de ronce ayant viré au rouge brique. Des Alisiers torminaux également très colorés. Charmes et Ormes se parant de jaune. Le gris du crachin recouvre à nouveau toute la nature. Superposant un voile de monotonie sur les mille nuances de la fin septembre.

 

Depuis une seconde digue, nous retrouvons le Balbuzard pêcheur. Il est maintenant posé sur un piquet de bois au milieu de l’étang. A-t-il pris un poisson ? A-t-il mangé ? Rien ne l’indique. Ni n’indique le contraire non plus. L’oiseau n’a rien dans les serres. S’il a pêché, la proie a été engloutie dans son ensemble.

 

La pluie a de nouveau cessé – et ne reprendra plus. Un Rougegorge chante au sommet d’une aubépine, son plastron orangé mis en évidence. Des Grives musiciennes crient depuis les grands chênes : des « psitt » assez sourds mais bien audibles. Des Pipits farlouses passent au vol en petites bandes lâches. Deux individus, puis trois… Au-dessus de l’eau, plusieurs dizaines d’hirondelles volettent. De droite, de gauche dans un capharnaüm complet. Nous observons les trois espèces : l’Hirondelle de fenêtre avec son croupion blanc, l’Hirondelle de rivage avec son petit collier brun et l’Hirondelle rustique – majoritaire – avec sa gorge acajou. Beaucoup de ces oiseaux ont interrompu pour quelques heures leur fuite vers le sud pour se nourrir d’insectes, plus nombreux au bord de l’eau.

 

La migration a débuté.

 

La sortie s’achève sur l’une des premières espèces de la balade. Un Martin-pêcheur d’Europe arrive au vol. Comme à son habitude à la vitesse d’une flèche fendant l’air. Mais au lieu de disparaître derrière une ligne de roseaux comme ce fut le cas depuis le début de la matinée, l’oiseau se pose en évidence sur la branche basse d’un saule. Dans la lunette d’observation, avec un grossissement de vingt ou trente fois, le plumage contrasté de bleu et d’orange fait sensation. A n’en pas douter, l’un des oiseaux les plus colorés d’Europe.

 

L’eau a été l’élément à l’honneur de cette matinée terne et sans chaleur. Mais notre longue liste d’espèces et la qualité de nombreuses observations valaient la peine d’affronter la pluie qui a finalement cessé assez vite. Nous reviendrons à la mi-octobre pour suivre la migration d’automne.

 

Liste des espèces

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Oiseaux :

Grèbe castagneux, Grand Cormoran, Héron cendré, Grande Aigrette, Aigrette garzette, Cygne tuberculé, Bernache du Canada, Canard colvert, Sarcelle d'hiver, Canard souchet, Buse variable, Balbuzard pêcheur, Faisan de Colchide, Râle d'eau, Gallinule poule-d'eau, Foulque macroule, Bécassine des marais, Goéland leucophée, Mouette rieuse, Pigeon ramier, Martin-pêcheur d'Europe, Torcol fourmilier, Pic épeiche, Pic épeichette, Hirondelle rustique, Hirondelle de fenêtre, Hirondelle de rivage, Corneille noire, Geai des chênes, Mésange charbonnière, Mésange bleue, Mésange nonnette, Mésange à longue queue, Grimpereau des jardins, Rougegorge familier, Grive musicienne, Bouscarle de Cetti, Fauvette à tête noire, Pouillot véloce, Pipit farlouse, Bergeronnette grise, Étourneau sansonnet, Linotte mélodieuse, Bruant des roseaux

 

Amphibiens :

Grenouille verte

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