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5 septembre 2019

Fraîcheur d'automne... 

L’après-midi décline…

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Peu après dix-neuf heure sur ce petit coin du monde. Un vent venu du nord-ouest charrie des palanquées de nuages blancs et moins blancs et les emporte au loin. Les arbres ploient sous le souffle. L’eau du petit étang ridée de vaguelettes bat la berge abrupte. Le groupe se met alors en marche et pénètre en sous-bois.

 

Eole a tôt fait de lessiver le ciel. Les lumières du soir teintent la végétation d’or. L’automne qui n’est plus très loin a déjà jeté ici et là du jaune et du roux. La forêt n’est plus la pâte verte uniforme qu’elle était aux heures chaudes de l’été. Le virage est amorcé. Des grappes de glands (avec ou sans pédoncules) alourdissent les branches des gros chênes qui jalonnent le bord du sentier. Bruyères cendrées et Callunes communes forment au sol des taches de parme et de magenta.

 

Une épaisse polaire sur le dos, nous progressons en direction du couchant, surpris par la fraîcheur de l’instant. Fraîcheur subite qui tranche avec la grande douceur des précédentes soirées. « Vous avez tous un vêtement supplémentaire en réserve ? » Oui, le groupe a été prévoyant. Nous affronterons sereinement le froid du début de nuit.

 

Le chemin est magnifique. Paysage harmonieux : pentes de fougères piquées de Pins sylvestres à gauche. Parcelles de feuillus composées de chênes, charmes, hêtres, noisetiers, sorbiers… à droite. De grands arbres en pleine santé. Certains sur le déclin. D’autres sur le point de mourir ou tout à fait déchus. Une grande variété de paysages et de biotopes à laquelle correspond une grande diversité faunistique. Des Pouillots véloces crient depuis les branches d’un bouquet de saules. Des Mésanges huppées volent de branche en branche. Un Grimpereau des jardins se manifeste depuis un tronc le long duquel il grimpe. Une Mésange nonnette occupe quelques-uns d’entre nous qui le prennent d’abord pour une Fauvette à tête noire.

 

Vers 20h30, une pause est décidée. Les sacs sont posés au sol. Les mains plongent à l’intérieur pour y puiser de quoi réconforter les estomacs affamés.

 

La fraîcheur augmente…

 

Devant nous, une belle lande de bruyère disparaît lentement, happée par la pénombre qui gagne du terrain à chaque nouvelle minute. Un premier croissant de lune inonde la clairière d’une lumière diaphane. A l’ouest, les ocres du couchant s’estompent déjà. Une légère brume se mêle aux rameaux des éricacées. Sur une pièce d’eau invisible, des Bernaches du Canada cancanent bruyamment.

 

La fraîcheur s’accentue. L’humidité de l’air caresse visages et mains nus. Alors que nous mordons à belles dents nos sandwiches, une main se lève brusquement en direction de la lande. Une silhouette se découpe sur le ciel rosé. Un oiseau. Au vol papillonnant. Il disparaît aussitôt sur le fond sombre de l’orée du bois. Un Engoulevent d’Europe chasse les rares insectes qui volent encore dans l’air refroidi. Un dernier oiseau qui s’apprête sans nul doute à quitter la France pour entamer sa longue migration vers l’Afrique subsaharienne.

 

Le premier coup de gueule est entendu peu avant 21h30 alors qu’une petite bande de Chevaliers culblancs – un limicole migrateur – tourne autour de l’étang en contre-bas. Un cerf ouvre la soirée et brame dans le lointain. Ambiance irréelle, fantomatique. Une voix empreinte de surnaturel venue du plus profond de la nuit.

 

Nous patientons encore quelques minutes. Pour écouter si ce premier contact agit comme un signal guetté par d’autres. Une première note isolée en prélude d’une symphonie. Mais rien. Aucun écho. Juste le silence sombre de la forêt endormie. Puis à nouveau cette même voix. Loin au ponant.

 

Si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira à toi…

 

Rompant avec notre immobilité engourdie, nous reprenons notre marche. La nuit – complète maintenant – est criblée d’étoile. Au sud, un triangle équilatéral étincèle : la lune, Jupiter et Antares luisent de mille feux. Saturne est plus à l’est, mais nos jumelles sont trop faibles pour distinguer clairement son célèbre anneau. La forêt nous avale. En file indienne, notre petit groupe d’Argonaute suit en silence le chant des sirènes. Leur voix enfle à chaque minute. Les cerfs sont deux. Demeurant invisibles au cœur d’une parcelle forestière, les animaux se défient. Si proches l’un de l’autre que nous nous attendons à entendre leurs ramures s’entrechoquer brutalement. Le combat n’aura pourtant pas lieu – un animal recule au fur et à mesure que l’autre avance. La suprématie du dominant n’est pas contestée.

 

L’heure tardive nous arrache au spectacle. Nous rebroussons chemin, heureux de cette rencontre. Deux lucioles orangées trouent la nuit une minute – une femelle très agitée et gigotant en tous sens ; un mâle plus calme. Une Chouette hulotte hulule en conclusion d’une belle soirée. Les véhicules sont rejoints à 23h30 après une marche rapide qui nous a un peu réchauffés. Le silence s’est refermé sur les bois. La lune a disparu derrière les arbres et nous nous séparons, pressés de retrouver la chaleur de la couette. 

 

Liste des espèces

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Oiseaux :

Héron cendré, Bernache du Canada, Canard colvert, Chevalier culblanc, Pigeon colombin, Pigeon ramier, Chouette hulotte, Engoulevent d'Europe, Pic vert, Pic épeiche, Mésange bleue, Mésange huppée, Mésange nonnette, Grimpereau des jardins, Troglodyte mignon, Rougegorge familier, Merle noir, Pouillot véloce, Roitelet huppé, Pinson des arbres

 

Mammifères :

Cerf élaphe

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